Le 25e Forum de l’Organisation de coopération de Shanghaï (OCS), réuni à Tianjin, les 31 août et 1er septembre, n’a pas choisi son lieu au hasard. Cette ville du nord de la Chine témoigne de l’époque des concessions étrangères issues des guerres de l’opium.
Outre les chefs d’Etat des membres permanents de l’OCS (Biélorussie, Chine, Inde, Iran, Kazakhstan, Kirghizistan, Ouzbékistan, Pakistan, Russie et Tadjikistan), une quinzaine de pays partenaires, dont l’Egypte, la Malaisie et la Turquie, étaient également présents, ainsi que le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (ONU), Antonio Guterres. Puis vint le défilé militaire, saisissant, célébrant le 80ᵉ anniversaire de la fin de la seconde guerre mondiale après la capitulation japonaise.
Ce qui s’est joué en Chine dépasse de loin un simple aperçu du nouvel ordre international : c’est la configuration même à laquelle nous devons désormais nous préparer. Deux interrogations majeures se dessinent. Malgré ses contradictions et ses fragilités, notamment démographiques, que fera la Chine de la puissance qu’elle a accumulée ? Et à quoi pourrait ressembler un monde marqué par le déclin de l’hégémonie américaine ? Selon la région du globe où l’on se situe, l’une ou l’autre de ces questions paraît plus immédiate. Pour l’Europe, l’exercice demeure sans doute le plus complexe, tant son horizon stratégique global reste incertain.
Repli des Etats-Unis
En septembre 1945, la puissance américaine incarnait la modernité et la puissance. Gandhi luttait pour l’indépendance de l’Inde, tandis que la Chine sombrait dans une guerre civile dont émergerait, quatre ans plus tard, la République populaire. En 2025, c’est à Pékin, avec l’Inde, que se dessine le nouvel ordre mondial postaméricain.
Ce basculement résulte du repli des Etats-Unis et de leur diplomatie de guerre commerciale, qui fragilise l’hégémonie qu’ils exerçaient depuis 1945, paradoxe ultime d’une trajectoire menée sous la bannière Make America Great Again. En miroir, la déclaration de Tianjin puis le défilé de Pékin illustrent le triomphe du Parti communiste chinois, fondé il y a cent quatre ans et fort de plus de 100 millions de membres. Xi Jinping y a présenté une synthèse du marxisme et des traditions chinoises, citant Laozi [père fondateur du taoïsme] et mobilisant l’adhésion des opinions publiques du Sud en martelant la fin du « siècle des humiliations ».
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