Pour son retour au Grand Palais, la foire Paris Photo, le rendez-vous mondial de l’image fixe, qui se tient jusqu’au dimanche 10 novembre, a déroulé le tapis rouge aux éditeurs de livres de photographie : ils sont 45 à l’étage, contre 35 en 2023, témoignant du succès du genre. « Certains visiteurs sont là juste pour ça, confirme la directrice, Florence Bourgeois. Plus de 400 auteurs viennent signer leur ouvrage. » Cette année, on y trouve aussi des livres anciens : sur le stand d’Alain Sinibaldi, le livre mythique (1931) du moderniste Moï Ver (1904-1995) est proposé à 30 000 euros. Au bord de la Seine, la péniche de la foire Polycopies accueille, de son côté, 90 éditeurs de livres photo du monde entier, et a invité le photographe Bernard Plossu à parler de ses ouvrages, lui qui en a publié… 300. « Chaque année, on refuse des éditeurs », témoigne l’un des organisateurs, Sebastian Hau, qui propose même des stands à la journée pour les plus petites maisons.
Le secteur est en pleine effervescence. Rien qu’en France plus de 200 ouvrages de photo sont publiés chaque année. En 2021, la revue PhotoBook Review estimait à 500 le nombre d’éditeurs spécialisés dans le monde. Pas de foire ou de gros festival photo, désormais, qui n’ait son secteur livre, sans parler des manifestations spécialisées. « Il y a eu ces dernières années une légitimation du livre de photographie comme outil d’expression artistique, à la fois dans les institutions et chez les collectionneurs », explique Clément Chéroux, directeur de la Fondation Henri Cartier-Bresson, qui organise chaque mois un « feuilletage » en public, où un auteur contemporain vient présenter son livre.
« Chez les photographes, c’est devenu aussi important que l’exposition, dit-il, et certains, comme Cristina de Middel, se sont fait connaître par leurs livres. » Pour l’historien, c’est le numérique qui a changé la donne. « Il est devenu possible de concevoir un livre avec un logiciel, de l’imprimer à des tirages plus réduits, de le vendre en ligne, de le faire connaître sur les réseaux sociaux… En conséquence, le nombre d’éditeurs a énormément augmenté. Sans parler de l’autoédition. »
Parallèlement, l’allure des livres a changé, avec des publications aux formes plus originales et expérimentales, aux maquettes travaillées par des graphistes toujours plus inventifs. « Aujourd’hui, on n’est plus dans le beau livre, le “coffee table book”, témoigne Fabienne Pavia, directrice des éditions Le Bec en l’air, à Marseille, qui publient une dizaine de livres par an. C’est devenu un genre éditorial à part entière, et un objet de création, qui crée une narration à partir d’images. »
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