Nouveau lieu, nouvelle enseigne, monumentale, en néon bleu et comme taguée de la main gauche ; celle-ci clignote, côté rue, au milieu d’une zone industrielle de Bobigny en pleine mutation urbaine. Côté cour, un portail ouvre sur les bords aussi bucoliques que graffés du canal de l’Ourcq, dans la continuité de La Villette et de Pantin. Voici la nouvelle implantation du Wonder, fine fleur artistique du bitume, dans un ancien garage de 6 000 mètres carrés en intérieur et 10 000 mètres carrés en extérieur, inauguré le 13 juillet par une de ces grandes fêtes pluridisciplinaires, underground et conviviales qui font sa réputation (et surnommées « opéras »), après un an et demi de travaux.
Projet qui va bientôt avoir quatorze ans, dont onze sous ce nom, Le Wonder avait commencé dans un squat à Paris, avant de déménager dans les anciennes usines de piles Wonder à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), une friche de 23 000 mètres carrés investie par une bande de jeunes à peine vingtenaires à l’époque, dont Nelson Pernisco, l’actuel président de l’association, ou le musicien électro Jacques, à l’iconique tonsure sur cheveux longs. Au départ des lieux, la bande – alors à la recherche d’un nouvel espace de travail – était allée voir au culot des promoteurs immobiliers, avant de passer un des premiers accords artistes-promoteurs, modèle qui lui a ensuite permis d’occuper un bâtiment à Bagnolet (Seine-Saint-Denis), puis à Nanterre, et à Clichy, dans les Hauts-de-Seine.
« Mais les deals en la matière sont devenus de plus en plus mauvais, on a donc choisi cette fois de signer avec l’Etat, propriétaire du bâtiment. Ça n’a pas été simple, mais on a accédé à un foncier qui est immense », détaille Nelson Pernisco. Alors qu’une étude réalisée par l’Etat tablait sur 1,3 million d’euros de travaux de rénovation en vue d’une occupation temporaire du bâtiment, l’équipe a fait le pari de le reprendre en faisant tout elle-même pour 300 000 euros (avec un emprunt de 110 000 euros à la clé), en devenant experte en récupération de matériaux et réemploi, et en se professionnalisant sur les chantiers (électricité, plomberie, murs…), afin de livrer un bâtiment aux normes. Elle a signé pour trois ans, reconductibles en fonction des décisions et projets du trio aménageur, mairie et Etat.
« Nous, on fait tout nous-mêmes »
Avec des aides financières de la région, de la direction régionale des affaires culturelles (ministère de la culture) et du département, le financement provient surtout de l’économie même de l’association, notamment des loyers des artistes. « On avait 70 artistes et on ne voulait pas, en doublant de taille d’ateliers − puisqu’on est passés de 3 500 à 6 000 mètres carrés d’ateliers −, doubler ou tripler le nombre d’artistes, comme certains autres projets d’occupation le font en ce moment. On voulait que ça reste à une échelle un peu familiale », précise le fondateur.
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