Michel Barnier n’est peut-être pas celui que l’on croit. Derrière l’image qu’il souhaite se donner, celle d’un dirigeant de droite prêt à tailler courageusement dans les dépenses de l’Etat pour sauver le pays, le premier cadrage budgétaire bouclé par le nouveau premier ministre et consulté par Le Monde dessine un autre profil. L’homme de la rigueur devrait être, aussi, celui d’un alourdissement spectaculaire de la fiscalité. Selon ce document, les hausses d’impôts représenteront plus de 60 % de l’effort d’assainissement financier prévu en 2025 par rapport à 2024.
Un plan de rigueur de 60 milliards d’euros en un an, dont 40 milliards de baisse des dépenses et 20 milliards d’impôts supplémentaires. Ces trois chiffres, massifs, impressionnants, se trouvent au cœur de la communication de Michel Barnier à l’approche du budget 2025, qui doit être présenté le 10 octobre. Le premier ministre l’a répété, jeudi 3 octobre, sur France 2 : « Dans l’effort que nous allons faire pour réduire la dette, 60 milliards, il y aura deux tiers de réduction des dépenses publiques. Et ça va être très dur. »
Vendredi, il a encore dramatisé l’enjeu pour justifier les « décisions difficiles » à venir : « Ce freinage, il est indispensable, sinon on va droit vers une crise financière », a-t-il affirmé lors d’un déplacement à Cournon-sur-Auvergne (Puy-de-Dôme).
« Faire bien avec peu »
Ces trois chiffres clés correspondent à autant de messages politiques. Un, l’ampleur inédite de l’« effort » annoncé est à la hauteur du déficit dont hérite le nouveau gouvernement, une situation « extrêmement grave » dont Michel Barnier dit avoir été « surpris ». Deux, en homme attaché au sérieux budgétaire, le nouvel hôte de Matignon entend consacrer l’essentiel de son énergie à s’attaquer enfin aux dépenses publiques, pour « faire bien avec peu », suivant l’enseignement de Charles de Gaulle cité dans son discours de politique générale, voire « mieux avec moins », comme il l’a dit en Auvergne. Trois, ce n’est qu’à titre subsidiaire, « exceptionnel et temporaire », qu’il se résout à augmenter certains impôts. Les hausses à venir n’ont d’ailleurs rien d’un « choc fiscal », a-t-il assuré sur France 2.
Pour aboutir à ces imposants 60 milliards d’euros, Michel Barnier raisonne en comparant deux scénarios. D’une part, ce qui se passerait en 2025 si aucune mesure n’était prise pour redresser le cap : le déficit public pourrait alors monter à 7 % du produit intérieur brut (PIB). D’autre part, ce que le gouvernement vise, soit un déficit de 5 % du PIB au maximum. Passer du « scénario tendanciel » de 7 % à l’objectif de 5 % nécessiterait un effort de 2 points de PIB, soit environ 60 milliards d’euros.
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