Quatre récits, quatre romans dont un jeunesse, trois biographies, deux recueils de poésie, un de photographies… Voici les brèves critiques de quatorze ouvrages notables en cette sixième semaine de l’année.
Récit. « La Manif », de Nelly Alard
Une recherche rapide sur Internet permet de retrouver sans peine les articles évoquant Romain D., jeune homme de 28 ans grièvement blessé à la tête par une grenade de désencerclement en marge d’une manifestation contre la loi « travail », en 2016. S’inspirant des faits réels, Nelly Alard rend compte dans La Manif de la déflagration que cette bavure policière a provoquée dans la famille du jeune homme. Trois temps rythment son récit : d’abord, celui de l’urgence et de l’incompréhension à l’annonce du drame ; ensuite, le temps plus long de l’espoir de justice après que le jeune homme est sorti du coma ; enfin, celui de la désillusion, lorsqu’un non-lieu est prononcé dans l’affaire, plusieurs années après les faits. A l’écoute des voix fêlées et intranquilles de ces êtres brisés par l’irruption de la violence policière dans leur vie, Nelly Alard propose une enquête très humaine qui, sans pouvoir réparer l’injustice, la pose là, nette, devant nos yeux. L. Hu.
« La Manif », de Nelly Alard, Gallimard, 224 p., 20 €, numérique 15 €.
Roman. « La Naturalisation », de Zied Bakir
Après L’Amour des choses invisibles (Grasset, 2021), roman drolatique du retour au pays d’un immigré tunisien, Zied Bakir relate avec mordant le parcours inverse d’Elyas Z’Beybi, de Tunis à Paris. « Z’Beybi » signifie « le solitaire, (…) celui qui n’a que sa bite et son couteau, dit-on en français potache ». Or Elyas a été circoncis la veille du coup d’Etat contre le président Bourguiba. Que faut-il en déduire ? Le sexe sera sa perte. Le héros burlesque débarque à Paris, le cœur débordant d’amour pour la France, sa littérature, ses femmes, et encore puceau. Il boit une bière avec un oncle, puis direction la rue Saint-Denis. Sa virginité perdue auprès d’une prostituée haïtienne, il tente d’embrasser sa directrice de thèse en littérature médiévale. Qui le repousse, et choit dans les escaliers du métro.
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