Dans une période troublée pour le Rassemblement national (RN), il s’agit d’un coin de ciel bleu pour le parti : le baromètre annuel de l’institut Verian pour Le Monde sur l’image du parti d’extrême droite, publié lundi 25 novembre, en partenariat avec la revue L’Hémicycle, confirme la percée dans l’opinion des idées de Marine Le Pen et Jordan Bardella, ainsi que la banalisation de leur formation, vérifiée dans les urnes. Mais le doute demeure sur la capacité du RN à convaincre une majorité d’électeurs – en particulier ceux de droite –, après une campagne des élections législatives (30 juin et 7 juillet) marquée par l’extrémisme et l’incompétence de plusieurs de ses candidats.
Cette étude marque « un tournant dans la dynamique du RN », juge Eddy Vautrin-Dumaine, directeur d’études de Verian. « L’adhésion à ses idées continue de progresser, mais il se trouve isolé et perd de son attractivité auprès des sympathisants de droite. A court et moyen terme, on peut nourrir des doutes sur son accession au pouvoir s’il n’est pas capable de réenclencher une dynamique en tendant la main au parti Les Républicains [LR]. »
Cette enquête – auprès de 1 004 personnes interrogées en face-à-face à leur domicile – est menée depuis maintenant quarante ans par le même institut et dans les mêmes conditions, permettant une vue sur le temps long de l’opinion des Français sur le parti d’extrême droite. On y lit ses atouts et ses points faibles. Incontestablement, ni le procès en cours visant le parti dans l’affaire des assistants parlementaires du Front national (l’ancien nom du RN) au Parlement européen, ni la déception des élections législatives n’ont entamé la dynamique du parti lepéniste. L’enquête a été réalisée du 12 au 20 novembre 2024, soit la période durant laquelle ont été annoncées les réquisitions du parquet demandant une peine de cinq ans de prison (dont deux ans ferme) et cinq ans d’inéligibilité immédiate à l’encontre de Marine Le Pen.
La « normalisation » du RN s’accélère dans l’opinion
Pour la première fois, en 2023, les sondés étaient plus nombreux à considérer que le RN « n’est pas un danger pour la démocratie » que l’inverse (45 % contre 41 %). Un an plus tard, l’écart se creuse : ils sont désormais 51 % à estimer que cette formation ne menace pas la démocratie, contre 38 % qui pensent l’inverse. Soit une hausse de dix points en deux ans, qui signale une accoutumance de la présence du RN dans les institutions – ce qui était précisément l’objectif du parti après l’élection de 89 députés en juin 2022. Ce chiffre est d’autant plus spectaculaire que le RN n’a jamais semblé aussi proche du pouvoir : plus de deux Français sur trois anticipent un tel scénario.
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