Négociateur du Brexit, ancien ministre, organisateur des Jeux olympiques d’hiver à Albertville en 1992 : Michel Barnier, 73 ans et figure de la droite, a été nommé premier ministre jeudi 5 septembre par Emmanuel Macron. Dans un paysage politique plus fragmenté que jamais, cette décision a suscité de vives réactions. A commencer par la gauche, où tous les responsables dénoncent une nomination incompatible à leur sens avec le résultat des élections législatives qui ont placé en tête le Nouveau Front populaire.
« L’élection a été volée aux Français », a dénoncé Jean-Luc Mélenchon. Evoquant « un premier ministre qui est nommé avec la permission et peut être sur la suggestion du Rassemblement national », le leader de La France insoumise (LFI) appelle, dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, « à la mobilisation la plus puissante que possible » samedi, lors de la manifestation contre ce que LFI et des syndicats lycéens et étudiants appellent le « coup de force » d’Emmanuel Macron, à savoir son refus de nommer à Matignon la candidate de la coalition de gauche, Lucie Castets. « Après cinquante-deux jours d’un gouvernement battu dans les urnes, [Emmanuel] Macron continue de se vivre comme en autocrate », a renchéri sur X Mathilde Panot, la patronne des députés « insoumis », qui estime que « le président refuse de respecter la souveraineté populaire et le choix issu des urnes ».
Le secrétaire national du Parti socialiste (PS), Olivier Faure, décrit, de son côté, sur le réseau social X un « déni démocratique porté à son apogée : un premier ministre issu du parti qui est arrivé en quatrième position et qui n’a même pas participé au front républicain » contre l’extrême droite. A ses yeux, la France entre « dans une crise de régime ». Le PS, dans un communiqué, déclare qu’Emmanuel Macron « piétine le vote des Françaises et des Français » et fait savoir qu’il « censurera » le gouvernement de Michel Barnier – ce qui suppose toutefois de faire adopter une motion de censure à la majorité absolue des députés.
Pour Fabien Roussel, « un bras d’honneur »
Dépit comparable du côté de Marine Tondelier. « De qui se moque-t-on ? C’est un vrai scandale », a considéré la cheffe de file des Ecologistes dans une vidéo publiée sur X. Selon elle, « ce qui vient de se passer en France pendant soixante jours (…), si ça s’était passé n’importe où en Europe, on aurait trouvé ça déplorable sur le plan démocratique ». « Cette histoire inédite prend une tournure extrêmement préoccupante », a-t-elle poursuivi.
Pour l’ancien député du Nord Fabien Roussel, la nomination de Michel Barnier à Matignon est « un bras d’honneur aux Français qui aspirent au changement ». « Libéral, européiste, antisocial, [Michel] Barnier est aux antipodes du message envoyé par les Français aux législatives », a réagi le secrétaire national du Parti communiste sur X.
De leur côté, le patron du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, et la présidente du groupe du RN à l’Assemblée nationale, Marine Le Pen, ont assuré que leur parti jugerait Michel Barnier sur son « discours de politique générale » avant de décider d’une éventuelle censure. « Nous plaiderons pour que les urgences majeures des Français, le pouvoir d’achat, la sécurité, l’immigration, soient enfin traitées, et nous nous réservons tout moyen politique d’action si ce n’était pas le cas dans les prochaines semaines », a affirmé Jordan Bardella sur X.
Michel Barnier « semble répondre au moins au premier critère que nous avions réclamé, c’est-à-dire un homme qui soit respectueux des différentes forces politiques et capable de pouvoir s’adresser au Rassemblement national, qui est le premier groupe de l’Assemblée nationale, de la même façon qu’aux autres groupes », a déclaré, de son côté, Marine Le Pen sur LCI.
Dans le bloc central, le parti macroniste, Renaissance, a fait savoir sur X qu’il compte présenter ses « priorités programmatiques » au nouveau locataire de Matignon et ne votera pas de « censure automatique » contre le nouveau gouvernement qu’il doit former. Pour Renaissance, le président a « rempli son rôle constitutionnel » en vue d’un « gouvernement stable ». « Nous devons désormais réunir pour réussir (…). Les députés y prendront toute leur part et sauront prendre leurs responsabilités », a réagi, pour sa part, sur X Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale et membre du groupe politique macroniste.
La « totale confiance » d’Olivier Marleix
Renaud Muselier (Renaissance), le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur a félicité Michel Barnier. « Nous avons besoin d’un gouvernement de sauvegarde nationale, et tout doit être fait pour qu’il réussisse. L’intérêt national, la responsabilité, c’est de l’aider et se rendre disponibles pour apporter nos contributions, a-t-il souligné sur X. Michel Barnier a les valeurs qu’il faut dans de telles circonstances : celles d’une droite gaulliste et rassembleuse. Refus des extrêmes et des incompétents. Constance, travail et grande expérience. »
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Edouard Philippe, l’ex-premier ministre d’Emmanuel Macron qui a annoncé mardi sa candidature à la prochaine élection présidentielle, a également réagi à la nomination de M. Barnier. « Sa tâche s’annonce rude mais la difficulté ne lui a jamais fait peur. Et nous serons nombreux à l’aider », a-t-il écrit sur X.
A droite, Laurent Wauquiez, le chef de file des députés de la Droite républicaine, s’est dit très enthousiaste sur X. M. Barnier « est un homme d’une grande qualité qui a tous les atouts pour réussir dans cette difficile mission qui lui est confiée », a-t-il écrit. Satisfecit également pour Olivier Marleix, vice-président du parti Les Républicains (LR), qui a fait part de sa « totale confiance » sur le même réseau. Quant à Valérie Pécresse (LR), la présidente de la région Ile-de-France, a jugé sur X que le nouveau locataire de Matignon « doit trouver un chemin parlementaire pour pouvoir rétablir l’ordre dans [les] comptes [de l’Etat], [aux] frontières et dans [les] rues [de France] ».
La présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, a aussi félicité sur X ce fin connaisseur de Bruxelles qui fut eurodéputé, commissaire européen et chargé de négocier avec Londres le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. « Je sais que Michel Barnier a les intérêts de l’Europe et de la France à cœur, comme le démontre sa longue expérience », a-t-elle écrit.