Pour les rebelles russes engagés contre Moscou qui ont rejoint les rangs ukrainiens, l’offensive lancée le 6 août par l’armée de Kiev dans la région de Koursk, en Russie, aurait pu être, après un an et demi d’opérations clandestines et de raids à portée limitée, une opportunité. Des retrouvailles avec la terre natale. L’état-major de l’armée ukrainienne en a pourtant décidé autrement : les partisans russes ont été tenus à l’écart de l’opération la plus audacieuse lancée par Kiev depuis deux ans et demi.
Tant Ilia Ponomarev, le chef politique de la légion Liberté de la Russie, que Denis Kapoustine, dit « Rex », le commandant du corps des volontaires russes (RDK), confirment que leurs unités ont été exclues. Les deux hommes confirment par ailleurs une information nettement plus sensible, et devenue au fil des semaines un secret de polichinelle en Ukraine mais qu’aucun officiel à Kiev ne commente publiquement : le GUR, le service de renseignement militaire ukrainien, qui coordonne l’activité des rebelles russes et qui, surtout, mène ses propres opérations en territoire ennemi, a été écarté par l’état-major de l’« opération Koursk », ou du moins de sa phase initiale d’assaut.
« Le GUR et ses combattants russes ont été exclus de l’opération, mais ce n’est pas pour des raisons militaires, confie une source proche des mouvements rebelles. C’est davantage pour des raisons personnelles : [le commandant de l’armée ukrainienne, le général Oleksandr] Syrskyi, qui entretient une certaine rivalité avec [le chef des renseignements militaires, le général Kyrylo] Boudanov, souhaitait, en cas de succès, son heure de gloire. »
L’objectif est désormais politique
Les rebelles russes, qui ont participé à diverses incursions en Russie depuis leur premier raid, en mars 2023, dans la région de Briansk, puis lors d’une opération plus importante en juin 2023 dans celle de Belgorod, tentent de ne pas trop montrer leur frustration de ne pas être présents dans la région de Koursk.
Pour Ilia Ponomarev, qui, outre le groupe armé Liberté de la Russie, coordonne un « Parlement russe » en exil qui siège environ deux fois par an à Varsovie, en Pologne, l’objectif est désormais politique. « Si Kiev le souhaitait, nous pourrions administrer ces territoires en Russie. Nous avons dans notre mouvement des ex-élus locaux, y compris de la région de Koursk, qui pourraient gérer un pouvoir local alternatif à celui du Kremlin. »
M. Ponomarev, qui affirme que « cette option est en cours de discussion à Kiev », s’est envolé récemment pour Washington, estimant que « le principal obstacle est du côté des alliés de l’Ukraine, notamment des Américains, qui craignent tout ce qui pourrait ressembler à une politique de changement de régime [regime change] à Moscou ».
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