LA LISTE DE LA MATINALE
Cette semaine, des génies controversés, Henry Ford et Arnold Schönberg, des tabous intangibles, les mères infanticides et les étudiantes harcelées. Et les gens du Nord (de la France) qui ont plus que jamais « dans leur cœur le soleil qu’ils n’ont pas dehors ».
Un documentaire pour comprendre les femmes infanticides
Selon une note du ministère de l’intérieur de juillet 2022, une femme tue son enfant en France tous les dix jours. Cette statistique a interpellé la réalisatrice Sofia Fischer, qui a écrit à des femmes infanticides en prison, à leur famille, à leurs avocats, pour solliciter leurs témoignages, avec un engagement : « Si vous me confiez votre parole, je vous promets d’en prendre soin. » Elle en a fait un film, son premier, qui met en exergue les points communs à ces parcours tragiques. « Pour aider celles pour lesquelles ce n’est pas trop tard », dit-elle.
Trois témoignages sont présentés, en commençant par celui de Blanche et d’Alexia, respectivement mère et sœur d’Hélène, qui a tué son fils de 4 ans, avant de se donner la mort. La réalisatrice a pris le temps pour que la parole se libère et qu’Alexia évoque les attouchements du père. Pour Jean-Guillaume Le Mintier, avocat au barreau de Rennes, « il est plus rassurant pour la société de cataloguer ces femmes au rang de monstre plutôt que d’essayer de comprendre ». A la narration, l’actrice Laure Calamy lit des extraits de la lettre de Cécile envoyée depuis la prison : « Chère Sofia, (…) on ne se lève pas un matin en se disant qu’on va tuer son enfant… »
Troisième à témoigner, Christelle est filmée de dos. Malgré l’épreuve que cela représente pour elle, elle va raconter comment, à 18 ans, elle a basculé en voyant grandir son aînée. Avec, en point d’orgue, une séquence ininterrompue de plus de six minutes, qui débute par : « Mon père a frappé à la porte. J’ai ouvert comme on ouvre à son papa. J’ai cru qu’il allait me demander pardon. » En filigrane, ces drames mettent en exergue la charge qui pèse sur toute mère. La société leur en demande-t-elle trop ? « Vaste débat », dit Me Frédérique Baulieu, avocate au barreau de Paris. C. Pa.
Mères à perpétuité, documentaire de Sofia Fischer (Fr., Bel., 2024, 70 min). Sur Arte.tv jusqu’au 8 décembre.
Henry Ford, un visionnaire et inquiétant démiurge
Que retenir de Henry Ford ? L’ingénieur visionnaire qui, en associant le travail à la chaîne à une standardisation des produits, inventa le fordisme à l’origine de l’essor de l’industrie automobile ? Ou bien le patron antisémite, réactionnaire, capable de réprimer dans le sang la contestation ouvrière, démiurge rêvant de régenter les existences comme les pièces mécaniques ? Nicolas Glimois dresse le portrait d’un personnage beaucoup plus complexe que le mythe de celui qui mit l’« Amérique sur des roues ».
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