Le Sénat examine ce mardi 18 février une proposition de loi pour interdire tout signe religieux dans les compétitions sportives.
Actuellement, chaque fédération établit ses propres règles.
Le débat était revenu sur le devant de la scène avant la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris, l’été dernier, quand l’athlète française Sounkamba Sylla avait laissé éclater sa colère sur les réseaux sociaux. Sélectionnée pour le relais féminin 4×400 m, elle avait dû porter une casquette pour dissimuler son voile, à la demande de sa fédération. C’est pour éviter ce genre de situations que les Républicains (LR) ont déposé au Parlement une proposition de loi visant à interdire le « port de signes religieux ostensibles » dans les compétitions sportives. Les sénateurs en débattront ce mardi 18 février.
Les compétitions sportives sont un moment de représentation d’un club (…) et pas d’une appartenance politique ou religieuse
Les compétitions sportives sont un moment de représentation d’un club (…) et pas d’une appartenance politique ou religieuse
Michel Savin, sénateur LR de l’Isère
Dans le détail, le texte (nouvelle fenêtre) prévoit d’interdire à tous les sportifs, professionnels comme amateurs, de montrer par leur tenue leur appartenance à une religion. Toutes les compétitions organisées par les « fédérations sportives et les associations affiliées », aux échelons départementaux, régionaux et nationaux, seraient concernées. En juin, peu avant la dissolution, la Commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport de l’Assemblée nationale avait élargi l’interdiction aux tenues « manifestant ostensiblement une appartenance politique ».
Le but de cette proposition de loi : mettre fin à un flou auquel font face les fédérations sportives. Actuellement, chacune peut décider de ses propres règles. Par exemple, le port du voile (nouvelle fenêtre) est autorisé pour les handballeuses, les judokates ou encore les joueuses de tennis. En revanche, les instances du rugby et du volley ont, elles, interdit les signes religieux. Début février, Michel Savin, le sénateur de l’Isère à l’origine de cette proposition, jugeait primordial, sur Public Sénat (nouvelle fenêtre), que toutes les fédérations soient soumises au même régime : « Pour nous, ce texte est nécessaire pour donner un cadre et permettre aux fédérations et à l’ensemble des pratiquants, quelle que soit leur obédience religieuse ou politique, de pouvoir pratiquer un sport. »
Dans « Bonjour ! La Matinale TF1 », l’élu assure ce mardi que cela concerne « toutes les religions » car « les compétitions sportives sont un moment de représentation d’un club, d’une ville, d’un territoire et pas d’une appartenance politique, religieuse ou syndicale donc il faut sanctuariser ce moment ».
Une harmonisation « souhaitée par beaucoup de fédérations »
Cette harmonisation est « souhaitée par beaucoup de fédérations », plaide à l’AFP une source au sein du mouvement olympique français. Le monde du sport est resté marqué par les polémiques nées avec le collectif des Hijabeuses qui revendiquait le droit de porter le voile lors des matchs de foot. En 2023, le Conseil d’État leur avait finalement donné tort, malgré un avis contraire du rapporteur.
Mais certains craignent que cela empêche certaines femmes de pratiquer une activité physique dans un club. C’est ce qu’a dénoncé sur Franceinfo (nouvelle fenêtre) Béatrice Barbusse, sociologue mais aussi vice-présidente de la Fédération française de handball : « Ce sont des conséquences désastreuses sur ces femmes : perte de confiance, déclassement, de la colère. Donc, on est en train d’exclure des femmes parce qu’autour, il y a des gens qui ne l’acceptent pas en tant qu’arbitre, en tant que dirigeant, en tant qu’entraîneur, en tant que simple spectateur. »
Aucune étude ne permet cependant de savoir combien de personnes cette réforme toucherait. Un rapport (nouvelle fenêtre) de l’Institut des hautes études du ministère de l’Intérieur (Ihemi) de mars 2022, révèle que les données collectées « échouent à montrer un phénomène structurel ni même significatif de radicalisation ou de communautarisme dans le sport ».
Les associations ne respectant pas ce principe de neutralité et de laïcité pourraient voir leur agrément suspendu par la préfecture. Enfin, la proposition de loi des Républicains, que le gouvernement devrait soutenir, invite à interdire l’utilisation d’équipements sportifs à des fins religieuses, comme pour des prières collectives dans des gymnases. Dans les prochains mois, ce sera à l’Assemblée nationale de se prononcer sur ce texte.