Prise sous la pression du gouvernement américain, la décision de Maxar Technologies de cesser de partager des images satellites clés avec l’Ukraine, effective le 7 mars, a choqué le monde entier. Auparavant, le bruit a couru que les Etats-Unis, pour faire évoluer à leur avantage la négociation sur les minerais, avaient menacé les Ukrainiens de leur couper l’accès à la constellation de satellites Starlink d’Elon Musk, crucial en temps de guerre. Musk a lui-même évoqué cette hypothèse sur X avant de démentir vouloir priver l’Ukraine de Starlink. Le message est clair : le gouvernement américain utilise désormais sa domination technologique comme une arme dans l’arène géopolitique, ce qui a des conséquences profondes pour l’Europe dans son ensemble. Celle-ci doit s’en alarmer. Le mieux serait de convoquer sans attendre une grande conférence technologique, afin de définir comment s’affranchir de la dépendance aux outils américains – civils comme militaires.
Ce ne sera pas tâche facile, car cette dépendance existe pratiquement à tous les niveaux de la chaîne : du domaine spatial à l’infrastructure numérique, en passant par les microprocesseurs, les données en cloud (les Américains contrôlent plus de 70 % du marché européen), ainsi que la plupart des logiciels et applications.
Les efforts engagés pour créer des solutions souveraines européennes ont souvent échoué ou sont balbutiants. Par exemple, IRIS², le concurrent de Starlink (un projet estimé à 10,6 milliards d’euros que porte la Commission européenne), va certes dans la bonne direction, mais il ne sera pas prêt avant 2030. En attendant, le continent est extrêmement vulnérable. Le nouveau comportement américain redouble également les inquiétudes quant à la sécurité des données des Européens, collectées et stockées par des entreprises américaines.
Promouvoir des alternatives
Cette situation est le résultat de choix inconséquents : les acteurs européens ont constamment opté pour des technologies américaines, plus avancées et mieux financées, plutôt que promouvoir leurs propres solutions. Encore aujourd’hui, le gouvernement italien hésite, pour porter les communications militaires sensibles, entre un investissement de 1,5 milliard d’euros dans Starlink ou une alternative européenne. Illustration de cet aveuglement stratégique : la Ligue, le parti de Matteo Salvini, a déclaré qu’il était « étrange » que l’Italie « choisisse une entité française [Eutelsat] au lieu d’un système plus développé technologiquement et d’avant-garde comme celui des Américains ».
Il vous reste 57.09% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.