Ils pourraient constituer une « bombe climatique ». Les nouveaux projets de terminaux d’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL), qui se multiplient depuis le début de la guerre en Ukraine en février 2022, pourraient émettre plus de 10 milliards de tonnes de gaz à effet de serre d’ici à 2030. C’est presque l’équivalent des émissions annuelles des centrales à charbon en activité au niveau mondial, prévient Reclaim Finance, dans un rapport publié jeudi 5 décembre. L’organisation non gouvernementale (ONG) dénonce le soutien « sans limite » des banques et des investisseurs à l’expansion de cette énergie fossile.
A quelques jours du sommet mondial du GNL, du 9 au 12 décembre à Berlin, Reclaim Finance voulait « déconstruire » le discours de l’industrie axé sur la sécurité énergétique et sur la transition, alors que le gaz naturel est présenté comme l’énergie fossile la moins polluante. « Les nouveaux terminaux de GNL, dont la durée de vie est de plusieurs décennies, enferment les pays dans des trajectoires carbonées, mettant en péril le développement des énergies renouvelables et les objectifs climatiques de l’accord de Paris », prévient Justine Duclos-Gonda, l’une des autrices de l’étude, experte à Reclaim Finance.
Depuis deux ans, huit projets de terminaux d’exportation de GNL et 99 projets de terminaux d’importation ont déjà été achevés sur la planète, ce qui a accru les capacités mondiales d’exportation de 7 % et d’importation de 19 %, selon le rapport.
Polluants et superflus
La tendance pourrait encore s’accélérer. Les entreprises pétrogazières telles que Shell ou TotalEnergies, ainsi que les compagnies spécialisées dans le secteur, projettent de construire 156 nouveaux projets de terminaux de GNL d’ici à 2030, dont 63 dans l’exportation et 93 dans l’importation, selon le rapport qui se base sur des données issues de la Global Oil & Gas Exit List, compilée par l’ONG Urgewald et une cinquantaine d’associations. « Cela ne signifie pas 156 nouveaux terminaux, un terminal pouvant recouper plusieurs trains [infrastructures] et extensions, avec des mises en service et des financements différents », précise Louis-Maxence Delaporte, également auteur du rapport et analyste au sein de l’ONG. Les nouveaux projets d’exportation sont majoritairement concentrés aux Etats-Unis, au Qatar, au Canada ou au Mexique, à destination de l’Europe et de l’Asie.
Ces projets polluent sur l’ensemble de la chaîne. L’extraction du gaz est associée à des fuites de méthane (qui constitue environ 90 % de la composition du GNL), un gaz à effet de serre plus de 80 fois plus puissant que le CO2 à un horizon de vingt ans. Sa liquéfaction (pour le refroidir à − 162 °C), son transport sur des méthaniers et sa regazéification sont gourmands en énergie. Enfin, l’utilisation du GNL émet du CO2.
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