Une action qui recule de 7,3 %, à Paris, jeudi 5 décembre, la trajectoire de la loi de programmation militaire perturbée par le chaos politique en France, une chaîne de fournisseurs fragile jusqu’en 2026, des tensions commerciales exacerbées par le retour de Donald Trump à la Maison Blanche… Tout cela brouille l’horizon de Safran, même si les fondamentaux de l’équipementier aéronautique restent solides, avec des commandes record d’avions moyen-courriers et des budgets de défense en forte hausse dans le monde.
Analystes et investisseurs n’ont retenu que le plan de vol prudent tracé, jeudi 5 décembre, par son directeur général – une prudence toujours de mise chez Safran. Après des difficultés en 2024, Olivier Andriès a, pourtant, annoncé une remontée en cadence de la production des moteurs Leap équipant l’Airbus A320 Neo, le Boeing 737 MAX et le C919 chinois de Comac : elle passera de moins de 1 500 unités, cette année, à 2 500 en 2028. Ce qui rend « prioritaire » à ses yeux la sécurité d’approvisionnement en matières premières et en pièces forgées.
Si l’activité « propulsion » tire le groupe, M. Andriès veut aussi qu’il « change d’échelle » dans les systèmes de navigation (y compris pour les navires et les sous-marins), l’électronique de défense et l’optronique. La preuve par le rachat en cours de l’américain d’une partie de Collins Aerospace à sa maison mère RTX (ex-Raytheon). La maintenance des réacteurs offre aussi des perspectives florissantes. Safran prévoit au total un apport de liquidités de 15 milliards à 17 milliards d’euros d’ici à 2028.
Les crédits de la défense gelés
Le groupe n’en est pas moins soumis à une double contrainte. La commande publique française pour sa branche militaire, d’abord. M. Andriès s’inquiète du niveau des crédits 2025 de la défense, gelés à leur niveau de 2024 en raison de la chute du gouvernement de Michel Barnier, soit une perte totale de 3,3 milliards d’euros. La « marche » qui était inscrite dans la loi de programmation militaire 2024-2030 risque de ne pas aller à l’équipement des armées.
L’énergie, ensuite. Son coût, qui pèse sur la rentabilité, est, aussi, un critère décisif du choix de localisation d’un site de production. De quel côté de l’Atlantique penchera la balance pour l’usine de freins carbone, un investissement de 400 millions d’euros : vers Feyzin (Métropole de Lyon), qui s’impatiente depuis 2019, ou vers l’Amérique du Nord ? Les prix de l’électricité et du gaz donnent un énorme avantage comparatif aux Etats-Unis et au Canada. Réponse au premier semestre 2025, a promis M. Andriès. Dans cette affaire, les menaces du président élu des Etats-Unis, Donald Trump – autoproclamé « M. Droits de douanes » –, semblent secondaires.