- Le dispositif d’aide alimentaire soutenu par Israël et les États-Unis, qui ne repose que sur quatre centres, est vivement critiqué.
- Il est accusé de mener à des scènes de violences et de provoquer des centaines de morts, notamment lors de fusillades touchant des habitants venus chercher de la nourriture.
- L’ensemble de la population est menacée par la famine selon l’ONU, qui accuse l’État hébreu de « crime de guerre ».
Suivez la couverture complète
Israël veut prendre « le contrôle » de Gaza
Ils sont des milliers à traverser un paysage désertique, au milieu des ruines de bâtiments effondrés, à la recherche d’un sac de farine. Pour ces hommes et ces enfants gazaouis, il faut souvent marcher plusieurs kilomètres, dans une zone militaire tenue par Israël, pour rallier l’un des centres de distribution de la Fondation humanitaire de Gaza (nouvelle fenêtre) (GHF), soutenue par Tel-Aviv et Washington.
Mais une fois sur place, la demande est telle que les habitants se retrouvent fréquemment face à des stocks vides, et repartent sans rien. « Je suis resté des heures ici et je n’ai rien obtenu. C’est la même chose depuis dix jours »
, soupire un homme dans le reportage du 13H de TF1 en tête d’article. Seuls quatre centres de distribution ont été ouverts pour les plus de deux millions d’habitants que compte la bande de Gaza.
Scènes de panique lors de tirs
Israël avait imposé début mars un blocus humanitaire à Gaza (nouvelle fenêtre), entraînant de très graves pénuries de nourriture et de médicaments. Ce blocus n’a été que partiellement assoupli fin mai, avec le lancement d’un mécanisme de distribution d’aide piloté par la GHF. Tous les centres sont situés dans des zones militaires tenues par les forces israéliennes et la distribution est organisée par des agents de sécurité privés, israéliens et américains. Washington a d’ailleurs annoncé jeudi avoir débloqué 30 millions de dollars pour financer cette fondation, assurant que quelque 46 millions de repas avaient déjà été distribués.
Mais ce dispositif fait l’objet de nombreuses critiques. Outre le manque de moyens au regard du besoin criant des habitants (nouvelle fenêtre), ces distributions donnent souvent lieu à des scènes chaotiques, lors de bousculades, et même meurtrières, avec des cas de fusillades. Dans le reportage en tête d’article, une vidéo laisse par exemple voir des habitants venus à la distribution fuir dans la panique, tandis que des tirs retentissent. Selon le ministère de la Santé de Gaza, depuis la fin du mois de mai, près de 550 personnes ont été tuées à proximité de ces centres d’aide. La fondation, elle, nie tout incident à l’intérieur de ses sites.
Selon la Défense civile de Gaza, un organisme de premier secours, 62 personnes ont été tuées sur la seule journée de vendredi par des frappes ou des tirs israéliens dans différents secteurs de l’enclave palestinienne, dont 10 alors qu’elles attendaient de recevoir de l’aide humanitaire. La veille, 7 personnes avaient été tuées dans les mêmes circonstances, d’après elle. L’armée israélienne, de son côté, a nié catégoriquement des tirs sur des personnes attendant de l’aide dans le centre de l’enclave, ce vendredi.
« Piège mortel », « massacres à la chaîne »…
De leur côté, l’ONU et des ONG humanitaires refusent de travailler avec la GHF, en raison de préoccupations concernant ses procédés et sa neutralité. « Le soi-disant
mécanisme d’aide récemment créé est une abomination (…) C’est un piège mortel »
, a fustigé Philippe Lazzarini, responsable de l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA).
Tandis que la population est au bord de la famine, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme a lui qualifié mardi de « crime de guerre »
l’utilisation de la nourriture comme une arme à Gaza (nouvelle fenêtre), exhortant l’armée israélienne à « cesser de tirer sur les personnes qui tentent de s’en procurer »
. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a de son côté annoncé avoir effectué mercredi sa première livraison de fournitures médicales dans le territoire palestinien depuis le 2 mars, mais déploré qu’il ne s’agisse que d’une « goutte d’eau dans l’océan »
.
L’organisation Médecins sans frontières (MSF) a quant à elle demandé vendredi le démantèlement de la GHF, fustigeant « un simulacre de distribution alimentaire qui produit des massacres à la chaîne »
. Elle a fait état de « plus de 500 personnes tuées et près de 4.000 blessées alors qu’elles se rendaient à ces distributions »
. Ses équipes reçoivent chaque jour des corps ou des blessés, et ont constaté, au fil des distributions, une forte augmentation des blessés par balle. Ce système force les Palestiniens « à choisir entre mourir de faim et risquer leur vie pour obtenir une quantité dérisoire de nourriture »
, a-t-elle affirmé.
Des notables locaux organisent leurs propres distributions
En parallèle, après plusieurs incidents et scènes de pillages, une coalition de familles influentes de Gaza, non affiliée au Hamas, affirme avoir mis en place d’autres centres de distribution sécurisés. L’aide est « distribuée que via les agences internationales »
et gérée « sous la supervision directe de la Haute commission aux affaires tribales de Gaza »
, a assuré ce regroupement de notables locaux, dans un communiqué publié jeudi.
Depuis ce jour-là, les familles filmées dans le reportage peuvent effectivement se procurer de la nourriture dans la ville de Gaza, sans risquer leur vie. Un accès vital pour nombre de Gazaouis. « Un sac de farine coûte 500 à 600 euros au marché noir, c’est impossible pour nous. On a besoin d’aide »
, souffle une femme. « Je suis heureuse car je peux enfin nourrir mes enfants, ils n’ont rien mangé hier et ils se sont
couchés le ventre vide
(nouvelle fenêtre)«
, explique une autre.
Le gouvernement israélien, lui, affirme que l’aide humanitaire est détournée par le Hamas : le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a commandé mercredi soir à son armée un plan « pour empêcher »
le mouvement islamiste « de s’emparer de l’aide »
. Des accusations que le Hamas a dit « rejeter »
catégoriquement, tandis que la Haute commission aux affaires tribales de Gaza a, elle aussi, fustigé des « affirmations mensongères »
, réclamant à l’ONU l’envoi d’observateurs pour « vérifier »
ces allégations.