Les régimes autoritaires sont des maladies auto-immunes politiques. Ils traitent les citoyens qui défendent la démocratie comme des agents pathogènes étrangers, c’est-à-dire comme un danger public. Ces régimes veulent tellement se protéger qu’ils finissent par s’attaquer eux-mêmes.
C’est la seule métaphore qui m’a traversée l’esprit lorsque le prix Israël [remis à des personnalités ou à des organisations ayant marqué l’année sur le plan culturel ou scientifique], qui m’a été attribué par un comité scientifique, m’a été refusé par le ministre de l’éducation, Yoav Kisch. Les sociétés autoritaires sont comme un corps réagissant de manière excessive, étouffées par leur mécanisme de défense. Elles ne savent plus faire la différence entre ennemis réels et imaginaires. Me refuser le prix Israël pour des raisons politiques est un symptôme de la maladie auto-immune d’Israël.
La même semaine où on m’a refusé le prix Israël, le gouvernement israélien a accueilli des représentants de partis d’extrême droite européens. Le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, et la députée européenne du parti Identité Libertés Marion Maréchal ont marché dans les rues de Jérusalem. Leurs partis politiques défendent une civilisation chrétienne qui a historiquement mis les juifs au ban, les voyant comme dangereux et inférieurs. Beaucoup de leurs électeurs sont antisémites.
Désillusionnée par les tribunaux internationaux
Le ministre israélien des affaires de la diaspora, Amichai Chikli, envisage même de tisser des liens avec le parti Alternative für Deutschland, dont certains membres ne cachent pas leur nostalgie pour les nazis. Je peux seulement imaginer qu’au fond d’eux-mêmes, ils se moquent doucement des juifs israéliens qui les confondent avec des alliés, et qu’Israël leur accorde un statut qui leur a fait défaut dans leur propre société. L’histoire n’est ni tragique ni farcesque, elle est profondément ironique.
Le système immunitaire d’Israël s’est effondré. Il s’est effondré depuis longtemps. S’il ne s’était pas effondré, le 7-Octobre n’aurait jamais eu lieu. Benyamin Nétanyahou et son gouvernement étaient tellement occupés à désigner leurs propres citoyens comme des ennemis qu’ils ne pouvaient pas voir le véritable ennemi. Ils ont confondu les pathogènes avec les bonnes protéines. Les juifs sont revenus à leur condition pré-sioniste : ils ne savent plus se défendre.
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