Plusieurs responsables politiques, de droite comme de gauche, ont mis en cause « la chaîne pénale et administrative » dans l’affaire du meurtre de Philippine, une étudiante tuée à Paris, jugeant que le suspect n’aurait pas dû être libéré avant l’obtention du laissez-passer permettant son expulsion vers le Maroc.
« Quand on a quelqu’un qui est en détention, qui est un individu dont on peut penser qu’il est une menace pour la société française, on ne devrait pas avoir à le libérer avant même qu’on ait l’assurance qu’il pourra repartir », a jugé le patron des socialistes, Olivier Faure, sur BFM-TV. « Le laissez-passer consulaire qu’on devait récupérer auprès des autorités marocaines devait déjà en réalité être récupéré avant même de le libérer ou de le mettre en rétention où les délais, là, sont en fait circonscrits dans le temps », a-t-il ajouté.
Trois jours après la découverte du corps de Philippine, enterré au bois de Boulogne, un suspect de 22 ans, condamné par le passé pour viol et sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) non exécutée, a été interpellé mardi en Suisse.
Placé au centre de rétention administrative de Metz à sa sortie de prison, le 20 juin, il en avait été libéré le 3 septembre par un juge des libertés et de la détention, selon une source proche du dossier. Cette libération est intervenue au moment de la quatrième et dernière possibilité de prolonger sa rétention de quinze jours, avant d’atteindre la durée maximale prévue par la loi, portée à quatre-vingt-dix jours en 2018. L’administration n’avait pas obtenu de laissez-passer consulaire (LPC) du Maroc, document de voyage indispensable à l’éloignement d’un étranger dépourvu de passeport. La veille du meurtre, le 19 septembre, il avait été inscrit au fichier des personnes recherchées, parce qu’il ne respectait pas son obligation de pointer.
« Faire évoluer notre arsenal juridique »
« C’est le problème des OQTF, il faut que ça aille vite », a souligné l’ancien président François Hollande, qui a mis en cause sur Franceinfo la « chaîne pénale et administrative ».
Le ministre de l’intérieur, le très conservateur Bruno Retailleau (Les Républicains, LR), a appelé sur X à « faire évoluer notre arsenal juridique ». « Nous ne pouvons pas nous contenter de déplorer ou de nous indigner », a-t-il martelé. « S’il faut changer les règles, changeons-les », a poursuivi Bruno Retailleau, qui appelle à « travailler » « ensemble, avec le ministre de la justice, dans le périmètre de nos responsabilités respectives, et sous l’autorité du premier ministre (…) pour assurer la sécurité de nos compatriotes ».
Sur France Inter, le président (LR) du Sénat, Gérard Larcher, s’est, lui aussi, interrogé sur le fonctionnement de la chaîne pénale, estimant que « c’est une des urgences » à traiter.
« Toute la lumière devra être faite sur les conditions de sa libération. Pour la sécurité des Français, l’expulsion systématique des délinquants et [des] criminels étrangers est un impératif », a pour sa part dit le député (Renaissance) Charles Rodwell sur X.
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Le président du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, a affirmé que le suspect n’avait « rien à faire sur notre sol », mais qu’« il a pu récidiver dans la plus totale impunité ». « Notre justice est laxiste, notre Etat dysfonctionne, nos dirigeants laissent les Francais vivre avec des bombes humaines », a ajouté le patron du parti d’extrême droite.
La députée (Les Ecologiste) Sandrine Rousseau a déclaré de son côté que ce « féminicide » méritait « d’être jugé et puni sévèrement », tout en ajoutant que l’extrême droite allait « tenter d’en profiter pour répandre sa haine raciste et xénophobe ».