Un premier rattrapage, mais qui reste largement insuffisant. C’est le constat que dresse, pour la France, le rapport 2024 de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (Cepej). Publié tous les deux ans, ce document, qui compare les moyens de la justice et son fonctionnement dans 44 Etats du Conseil de l’Europe, a été publié le 16 octobre. Ses données sont celles de l’année 2022. Il s’agit donc de la première édition qui intègre des données postcrise liée au Covid-19.
« Tous les systèmes judiciaires en Europe ont fait face, en 2020, à de nombreux défis (…) qui ont affecté leur fonctionnement, ce qui a eu un impact sur de nombreuses données présentées dans ce rapport », avertit ainsi le Cepej. Mieux vaut donc comparer les données de 2022 avec des données antérieures à 2020. De même, il convient de mettre en regard la situation française avec des pays de richesse et de développement équivalents.
Selon l’étude, la France dépense 77,20 euros par an et par habitant pour financer son système judiciaire (hors prisons, protection judiciaire de la jeunesse et fonctionnement du ministère), là où la médiane européenne est de 74,80 euros. En 2014, il s’élevait à 65,60 euros. Mais, à titre de comparaison, l’Allemagne consacre à la justice pratiquement le double avec 136,10 euros par habitant ; l’Italie, 100,60 euros ; l’Espagne, 96,80 euros, et la Belgique, 102,50 euros. Et si l’on regarde ce que représente le budget en pourcentage du produit intérieur brut (PIB), la France retombe sous la médiane (0,20 % contre 0,28 %), comme la Belgique (0,22 % du PIB). Au contraire de l’Allemagne (0,30 %), de l’Italie (0,31 %), de l’Espagne (0,34 %).
Les chiffres concernant la France traduisent les premiers effets des efforts budgétaires obtenus notamment par Eric Dupond-Moretti − nommé garde des sceaux en 2020, il a quitté ses fonctions fin septembre −, qui avait sanctuarisé une hausse budgétaire dans sa loi d’orientation et de programmation de la justice, adoptée fin 2023. Cependant, les objectifs de ce texte, qui prévoyait, d’ici à 2027, 10 000 recrutements en totalité, dont 1 500 magistrats et 1 500 greffiers, la construction de nouvelles places de prison, la rénovation de nombreux palais de justice, mais aussi la modernisation numérique, sont mis à mal par les économies prévues pour réduire la dette du pays.
Selon la première version du budget présenté début octobre, le coup de rabot pour la justice pourrait s’élever à près de 500 millions d’euros. Didier Migaud, le nouveau ministre de la justice, a obtenu des promesses de réajustements à la hausse. Cependant, il n’est pas sûr que cela comble entièrement le manque à gagner.
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