Une poignée de jours après son extradition vers la France, Félix Bingui, le chef présumé du clan Yoda, un des réseaux de narcotrafiquants à l’origine d’une sanglante guerre des gangs à Marseille en 2023, a été mis en examen et placé en détention provisoire, vendredi 24 janvier soir à Marseille, a déclaré son avocat, à l’Agence France-Presse.
« C’est dans un climat serein que tout cela s’est passé », a dit Me Philippe Ohayon, confirmant une information initiale de BFM-TV, avant de préciser que son client a été placé à l’isolement. Il a expliqué que Félix Bingui a été mis en examen des chefs « d’importation de substances stupéfiantes en bande organisée, blanchiment de trafic de drogue et non déclaration de ressources ».
Agé de 34 ans, celui que l’on surnomme « le Chat » avait fait toute sa « carrière » dans le trafic à Marseille. Il effectuait régulièrement des allers-retours au Maroc jusqu’au déclenchement, en février 2023, d’une « guerre » avec le gang rival de la DZ Mafia, moment à partir duquel il n’avait plus quitté ce pays du Maghreb.
Il y avait été arrêté en mars 2024 avant d’être extradé mercredi. « Il est soulagé d’être en France. Il va pouvoir s’expliquer sur les faits pour lesquels il est accusé », a ajouté Me Ohayon.
Son avocat déplore la communication de Gérald Darmanin
Mardi, le procureur de la République de Marseille, Nicolas Bessone, avait souligné que Félix Bingui était « impliqué par plusieurs dossiers d’instruction pour des faits de trafic de stupéfiants et d’association de malfaiteurs plus particulièrement », et qu’il est à ce « stade » présumé innocent.
Dans un courrier envoyé, jeudi, au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) au sujet de la communication de Gérald Darmanin autour de cette extradition, notamment sur le réseau social X, Me Ohayon avait regretté que le ministre de la justice se soit prononcé « sur la responsabilité pénale d’un justiciable qui n’a pas encore été mis en examen », portant ainsi « atteinte aux principes de séparation des pouvoirs, d’indépendance de la justice et de présomption d’innocence ».
« S’il y a une personne en France qui ne doit pas se prononcer sur la culpabilité d’un justiciable, c’est bien le garde des sceaux », a déploré de nouveau, vendredi, l’avocat.
Une confrontation ensanglantée avec le gang DZ Mafia
Sur X, lundi, Gérald Darmanin avait présenté M. Bingui comme « un des plus gros narcotrafiquants de notre pays », avant de l’accuser, mercredi sur BFM-TV, de « tentatives d’homicides en bande organisée ». En communiquant ainsi sur cette extradition, le ministre aurait de même « détourné une communication institutionnelle à des fins de promotions personnelles », ce qui est « strictement prohibé », a ajouté l’avocat dans ce courrier au CSM.
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En 2024, une violente guerre de territoires pour le contrôle des juteux points de deal – jusqu’à 80 000 euros de chiffre d’affaires quotidien à certains endroits – entre Yoda et la DZ Mafia avait ensanglanté la deuxième ville de France, avec un funeste record de quarante-neuf morts en 2023, dont quatre victimes collatérales.
En 2024, le nombre de ces narchomicides a été divisé par deux, avec vingt-quatre morts, en raison notamment de la fin de cette bataille, la DZ Mafia ayant pris le dessus sur le clan Yoda, comme l’a confirmé le procureur de Marseille.