DISNEY+ – A LA DEMANDE – SÉRIE
Des poursuites ponctuées de rafales d’armes automatiques, des explosions titanesques, des agents doubles et triples, une jeune femme flamboyante capable aussi bien de séduire une star que de mettre une ville à feu et à sang : dans Ne dis rien, ces ingrédients qui font l’ordinaire des séries d’action sont confrontés à la réalité. Celle des « Troubles » qui ont déchiré l’Irlande du Nord de la fin des années 1960 aux accords du Vendredi saint en 1998.
Adaptée du formidable ouvrage du journaliste américain Patrick Radden Keefe, la série Ne dis rien mue l’histoire – celle d’un pays en guerre, celle des gens qui l’ont menée ou subie – en fiction, sans jamais perdre de vue son ancrage dans l’océan des douleurs nées des « Troubles ». Cette rigueur, portée par une distribution impeccable et une mise en scène rigoureuse, emmenée par Michael Lennox, qui a réalisé quatre des neuf épisodes, fait de Ne dis rien le plus intelligent des thrillers. Ou, si l’on préfère, la plus captivante des leçons de politique.
Disparition de Jean McConville
On parlait de douleurs, l’une des figures centrales de la série s’appelle Dolours. Dolours Price est née en 1950 à Belfast, dans une famille républicaine. On fait sa connaissance en 1969 lorsque, avec sa sœur Marian, elle prend part à une marche pacifique pour l’égalité des droits entre catholiques et protestants. En pleine campagne, les manifestants sont lapidés par des unionistes que la police laisse faire. Dolours (Lola Petticrew, puis, plus tard, Maxine Peake) et Marian (Hazel Doupe, puis Helen Behan) se rendent aux arguments de leur père, qui fut artificier de l’Armée républicaine irlandaise (les repas de famille sont dominés par la présence de la tante Bridie, qui a perdu la vue et l’usage de ses mains en confectionnant une bombe), et rejoignent les rangs de l’IRA provisoire.
L’écriture et la mise en scène de ce basculement dans la lutte armée mettent en place la méthode de Ne dis rien : ne laisser de côté aucun des éléments constitutifs de la situation politique, leur donner chair en observant de très près leur impact sur les protagonistes. Dolours Price trouve dans l’IRA l’espace de création, de représentation, auquel elle aspire – même si cette création est une campagne d’attentats à Londres ; Marian, elle, pratique la lutte armée comme une ascèse, elle a beau être la plus religieuse des deux, elle s’interdit de faire appel à sa conscience. La première épousera l’acteur Stephen Rea à sa sortie de prison, la seconde reprendra la lutte armée après la conclusion des accords de 1998.
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