Où est passée la grâce qui portait le geste de Simon Abkarian, lorsque, à l’automne 2024, au Théâtre de l’Epée de bois, à Paris, il faisait entendre, dans Ménélas rebétiko rapsodie, la plainte rageuse de Ménélas, guerrier grec quitté par sa femme Hélène pour le Troyen Paris ?
Dernier volet du triptyque que l’auteur, metteur en scène et acteur consacre aux valses-hésitations du couple maudit, Nos âmes se reconnaîtront-elles ? n’a pas l’évidence de ce premier opus. Renouant plutôt avec l’affectation d’Hélène après la chute (deuxième séquence de la trilogie), le spectacle s’empêtre dans ce qui était pourtant une belle raison d’être : la relecture, depuis les rives du regard féminin, d’une histoire légendaire énoncée jusqu’ici par le seul point de vue masculin.
Sous la plume de Simon Abkarian, les retrouvailles d’Hélène et Ménélas s’accomplissent sur fond de dévastation. Troie est tombée, Paris est mort, des centaines d’hommes ont été massacrés par les Grecs en une nuit sauvage. Dans ce monde de ténèbres, sur ces décombres d’une civilisation anéantie par la folie humaine, ne demeure que l’espoir d’une réconciliation entre l’homme et la femme. Lui toujours fou d’amour, elle en deuil de son amant. Lorsque Ménélas se présente à Hélène, il a les yeux bandés, pas elle. Il est aveugle, elle est lucide. La messe est dite. Elle ne pardonnera pas.
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