LA LISTE DE LA MATINALE
Cette semaine, le beau est bizarre, avec une nouvelle édition des œuvres complètes de Baudelaire dans « La Pléiade » ; il est aussi spirituel au côté d’Elisabeth, héroïne de Raymonde Vincent (1908-1985), en quête d’une double réalité ; cultivons également notre jardin en philosophant pour redécouvrir de quelle façon les mots sont des actes avec une nouvelle édition de Quand dire, c’est faire, du philosophe John Langshaw Austin (1911-1960), ou encore la genèse du marxisme humaniste, retracée par Stéphanie Roza. Philippe Collin, quant à lui, écrit un roman de l’Occupation, contant l’histoire de Frank Meier (1884-1947), le plus grand barman du monde.
CLASSIQUE. « Œuvres complètes », de Charles Baudelaire
Avec Charles Baudelaire (1821-1867), jamais le dernier mot ne peut être prononcé, tant sa lecture déconcerte, y compris dans cette nouvelle édition, la troisième, des Œuvres complètes du poète qui paraît dans « La Pléiade », sous la direction de deux spécialistes du XIXe siècle, André Guyaux et Andrea Schellino. Si le corpus baudelairien établi par Eugène Crépet (1827-1892), éditeur et admirateur de l’auteur des Fleurs du mal dès la fin du XIXe siècle, reste inchangé, le parti pris de la nouvelle édition offre à l’amateur un regard rafraîchi sur une œuvre qui se lit aujourd’hui à travers le monde entier.
Les éditeurs ont cette fois opté pour un classement non par genre (poèmes, essais critiques, etc.) mais strictement chronologique. Ce choix contribue à mettre en relief la cohérence et le travail de l’écrivain. Les pièces lyriques alternent avec la critique permettant d’appréhender l’œuvre comme un tout. Fanal du romantisme tardif, Baudelaire a rejeté l’utopisme propre à la révolution de 1848, à laquelle il a pourtant pris part. Il se convulse face à la marche en avant d’une démocratie pas plus habitable pour le poète que pour le grand écrivain. Toutefois, ce partisan de l’aristocratie et de la peine de mort n’est pas toujours où on l’attend. Ces deux volumes de « La Pléiade » le montrent : antimoderne ou poète condamné pour immoralité, Baudelaire est toujours « bizarre » avec génie. N. W.
ROMAN. « Le Barman du Ritz », de Philippe Collin
Au rang des qualités d’un barman de palace, il y a, outre l’indispensable savoir-faire « mixologique », la science d’écouter et celle de se taire. Sans oublier les questions de préséance, et un sang-froid de diplomate pour gérer les situations délicates – l’ivresse d’un hôte de marque, l’inimitié entre des habitués… Frank Meier a tant fait preuve des unes et des autres à New York puis à Paris, où il a créé le bar de l’hôtel Ritz, qu’il a acquis la réputation de meilleur barman du monde.
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