L’Iran a annoncé, jeudi 12 juin, la prochaine construction d’un nouveau site d’enrichissement et une augmentation « significative » de sa production d’uranium enrichi, exacerbant les tensions sur son programme nucléaire avant des pourparlers avec les Etats-Unis prévus dimanche.
Peu avant ces annonces, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) avait adopté une résolution condamnant l’Iran pour « non-respect » de ses obligations en matière nucléaire, ce qui pourrait ouvrir la voie à un rétablissement des sanctions de l’Organisation des Nations unies.
Le ministre des affaires étrangères iranien, Abbas Araghtchi, a affirmé, jeudi, que cette résolution « ajoutait à la complexité des discussions » avec Washington, dont un sixième cycle est prévu dimanche par le biais d’une médiation du sultanat d’Oman. « Nous serons à Mascate pour défendre les droits du peuple iranien », a-t-il déclaré.
L’enrichissement d’uranium est la principale pierre d’achoppement, dans ces discussions visant à encadrer le programme nucléaire iranien en échange d’une levée des lourdes sanctions imposées à l’Iran. Les Etats-Unis exigent que l’Iran renonce totalement à l’enrichissement de l’uranium, ce que Téhéran refuse.
Le chef de l’Organisation de l’énergie atomique d’Iran (OEAI), Mohammad Eslami, a jugé « illégale » la résolution de l’AIEA, l’imputant à « l’influence » israélienne. M. Eslami a souligné que son pays avait respecté ses engagements envers l’AIEA mais qu’il s’était affranchi de certaines obligations liées à l’accord nucléaire conclu avec les grandes puissances en 2015, après le retrait unilatéral américain en 2018. Selon lui, l’enrichissement sur le nouveau site débutera « dès l’installation des machines ».
Israël appelle à une « réponse décisive »
Israël a aussitôt appelé la communauté internationale à « une réponse décisive » contre l’Iran, dont les actes constituent selon lui « une menace imminente pour la sécurité et la stabilité » internationales. Israël a maintes fois menacé d’attaquer les sites nucléaires iraniens.
Jeudi, le président américain, Donald Trump a déclaré qu’Israël pourrait frapper les installations nucléaires iraniennes. « Je ne veux pas dire que c’est imminent, mais il semble que c’est quelque chose qui pourrait très bien se produire », a-t-il déclaré à des journalistes. Il a toutefois appelé son allié à ne pas le faire. « Nous sommes assez proches d’un bon accord », a déclaré M. Trump à la presse, ajoutant à propos d’Israël : « Je ne veux pas qu’ils interviennent, parce que je pense que cela ferait tout capoter. » L’Iran a averti qu’il répondrait à toute frappe israélienne en ciblant les « installations nucléaires secrètes » d’Israël.
L’Iran avait, par ailleurs, menacé mercredi de s’en prendre aux bases militaires américaines dans la région en cas de conflit avec les Etats-Unis. Cinq séances de discussions ont eu lieu, et une nouvelle est prévue pour dimanche, selon Téhéran.
« Les Etats-Unis négocient de bonne foi afin de parvenir à un accord qui nous permettra » d’écarter « avec certitude » le risque que la République islamique se dote de l’arme atomique, a assuré cette semaine le chargé d’affaires américain Howard Solomon au siège de l’instance onusienne, à Vienne. « L’Iran a aujourd’hui une occasion claire de bâtir la confiance », en offrant à l’AIEA « plus de transparence » et en stoppant l’expansion de son programme nucléaire, a-t-il estimé.
L’Iran sommé de « changer de cap de toute urgence »
A Vienne, la résolution adoptée par l’AIEA appelle l’Iran à « remédier d’urgence au non-respect » des engagements pris en vertu du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). En l’état, l’AIEA, une instance onusienne, « n’est pas en mesure de garantir que le programme nucléaire iranien est exclusivement pacifique ».
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L’Union européenne a appelé l’Iran à « éviter toute mesure qui contribuerait à une escalade ». La France a dénoncé « la poursuite assumée de l’escalade nucléaire de l’Iran » et l’Allemagne a appelé Téhéran à renoncer « de manière crédible » à tout projet d’armement nucléaire.
L’Iran a, par ailleurs, augmenté depuis ces derniers mois sa production d’uranium enrichi à 60 %, seuil qui permet d’atteindre rapidement celui des 90 % nécessaires à un usage militaire. Son stock est suffisant pour fabriquer « plus de neuf » bombes, a rappelé la troïka européenne (l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni, UE-3) devant le conseil des gouverneurs.
« Tout en engageant cette année le dialogue avec les Etats-Unis et l[’UE-3], l’Iran a poursuivi sans relâche son escalade nucléaire, au-delà de toute justification civile crédible », ont déploré les diplomates européens, appelant la République islamique à « changer de cap de toute urgence ».