Le vent frémit sous le crin, la terre rougeoie sous la laine, les ors et les feuilles tombent mollement, tout ne tient qu’à un fil. Tisser, Olga de Amaral en a fait bien plus qu’un métier. De ses doigts de tisserande naissent des crépuscules, des automnes, des carrières creusées de filons d’or et des mines charbonneuses, des paysages de Lune ou d’étoiles lointaines. Chaque tapisserie, un monde. De ces mondes, la Fondation Cartier se laisse envahir tout l’hiver, jusqu’au 16 mars 2025, pour le plus grand plaisir du public qui vient en foule découvrir l’art de cette inconnue.
En Colombie, pays natal que jamais elle n’a quitté, Olga de Amaral est une célébrité de l’art textile, de l’art tout court. En France, nul ne la connaissait avant cette rétrospective-révélation, hormis quelques curieux qui l’avaient repérée dans l’exposition Décorum du Musée d’art moderne de Paris, en 2013.
Riche de 80 œuvres, dont la plupart n’avaient jamais traversé l’Atlantique, l’exposition vient consacrer une créatrice de 92 ans qui n’a rien à envier à l’Américaine Sheila Hicks. Bien connue dans l’Hexagone, cette dernière a elle aussi tiré tous les fils possibles de la création. Comme elle, l’artiste colombienne s’est souvent nourrie de l’art des tissages précolombiens, qui appartiennent à son histoire. Des qipu de tradition andine (ces cordes nouées qui servaient à « écrire » comptages ou généalogies), elle a retenu une leçon essentielle : « Les fils sont pour moi comme des mots », résume-t-elle.
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