Point d’orgue d’une série de prises de position dans le débat public depuis plusieurs mois, le premier ministre, François Bayrou, a déclaré, lors de sa conférence de presse du 15 avril, que l’impératif national était désormais de travailler plus pour produire plus. A l’écouter, si notre pays se trouve dans une situation aussi préoccupante, c’est parce que nous produisons moins que nos voisins du fait que nous travaillons moins qu’eux.
Que répondre à cette argumentation qui semble à première vue relever du bon sens ? D’abord que l’indicateur mobilisé, le produit intérieur brut (PIB), présente de nombreuses limites et ne reflète pas la richesse : une société peut avoir un gros PIB mais un patrimoine naturel dévasté, et être ravagée par les inégalités. Par ailleurs, la nature et la qualité de ce que nous produisons importent plus que la quantité. Or, à quelques exceptions près, la France est spécialisée sur des productions de moyenne gamme, qui sont peu concurrentielles avec celles, plus « haut de gamme » ou moins chères, de nos voisins.
La faiblesse de notre PIB par habitant s’explique-t-elle par le nombre d’heures de travail ? Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les Français ayant un emploi travaillent plus en durée annuelle que les Allemands, les Danois, les Néerlandais ou les Luxembourgeois. Pour mémoire, les pays où l’on travaille le plus sont, dans l’ordre décroissant, le Mexique, le Costa Rica, le Chili et la Grèce.
Fort déni des responsables politiques
La quantité de travail ne signifie rien : c’est la productivité qui compte. Alors, certes, la France est aujourd’hui moins productive qu’auparavant, en raison notamment des emplois maintenus par les entreprises à la suite du Covid-19 et de la forte augmentation de l’apprentissage, comme l’a montré l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
Il n’en reste pas moins que beaucoup d’autres éléments doivent être pris en considération, en plus du nombre d’heures de travail, pour comprendre la mauvaise situation française. On pense en particulier à l’insuffisance des investissements, notamment dans les secteurs de pointe, mais aussi à la faiblesse de la robotisation, de la recherche et développement, ou du niveau de qualification de la population active.
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