- L’IA s’immisce dans nos relations amoureuses, aidant à rédiger des profils ou à gérer des conflits.
- Cependant, elle propose des solutions simplistes, parfois biaisées, et manque de compréhension émotionnelle.
- Les experts avertissent des risques d’isolement et de désapprentissage des interactions humaines.
En quelques années, l’intelligence artificielle s’est invitée dans notre vie quotidienne. Aujourd’hui, elle joue le rôle d’assistante de vie, d’assistante de travail, de coach, de thérapeute et même de meilleure amie. Pour beaucoup d’individus, ChatGPT, Gemini et les autres chatbots sont devenus des confidents, notamment en matière de relations amoureuses. Certains ont recours à ces IA pour rédiger leur profil sur les applications de rencontre, choisir la meilleure punchline pour démarrer une discussion. D’autres cherchent même des conseils auprès d’elles lorsqu’ils rencontrent des difficultés dans leur couple, voire pour rompre avec leur partenaire. Selon un sondage réalisé par Wingmate en 2024, 41% des jeunes adultes ont déjà utilisé l’IA pour se séparer. Le sondage révèle également que 57% des personnes interrogées avouent qu’elles font plus confiance à l’IA qu’à un ami pour des conseils amoureux ou pour décoder les signaux ambigus d’un potentiel partenaire. En France, l’institut FLASHS pour Hostinger a noté que 18% des femmes interrogées ont déjà utilisé ChatGPT pour désamorcer un conflit dans leur vie amoureuse, 11% pour initier une rupture et 10% pour avoir des conseils. « En trois ans à peine, l’intelligence artificielle générative s’est glissée dans l’intime. Ce que les Français disent pouvoir maîtriser, ils l’intègrent pourtant dans leurs routines, leurs émotions, voire leurs décisions personnelles
« , explique Léa Paolacci, chargée d’études chez FLASHS, citée par ELLE (nouvelle fenêtre).
Des solutions simplistes et biaisées
Pour Kimberly Rae, coach en relations amoureuses, interrogée par le magazine Vogue (nouvelle fenêtre), l’IA peut « devenir une béquille
« . Problème : elle enlève le côté authentique de la personnalité. Pour elle, « les relations se construisent sur des échanges bruts, sur le moment, pas sur des dialogues parfaitement peaufinés. Et plus on polit nos mots, plus on risque de creuser une distance émotionnelle
« . Si l’IA peut aider à se confier lorsqu’on ne veut pas déranger un ami, elle ne comprend pas le passé, les relations amoureuses, les dynamiques parfois complexes ou encore les blessures émotionnelles et traumatismes. L’IA, par ailleurs, ne peut proposer que des solutions simples, voire renforcer des biais ou des schémas répétitifs, puisqu’elle a tendance à toujours être d’accord. Résultat : elle n’a qu’un seul point de vue et, lorsque les utilisateurs se confient, ils ne donnent pas l’image complète de la situation. Or « les problèmes relationnels ont deux facettes
« , rappelle Judith Joseph, psychiatre, interviewée par Vogue. Elle ajoute que recourir à l’IA plutôt qu’à un thérapeute expérimenté est un danger dans la mesure où « vous courez le risque de ne pas avoir les meilleures informations et de les utiliser d’une façon qui pourrait nuire à vos relations déjà fragiles
« .
L’IA générative peut être un outil complémentaire pour organiser ses pensées, se sentir peut-être moins seul dans un moment difficile. « Le mot de neutralité est très important. Ça donne l’impression avant tout d’avoir affaire à quelque chose qui ne juge pas, et qui écoute. Avec la vertu du dialogue, puisque c’est l’un des grands enjeux de ces robots
« , souligne Raphaël Gaillard, psychiatre, à France Inter. (nouvelle fenêtre) Néanmoins, elle ne peut pas remplacer un proche de confiance ou un psychothérapeute, un psychologue ou un psychiatre. « On a l’impression que dans l’intelligence artificielle générative, on va trouver des solutions, des palliatifs finalement à cette pénurie-là. C’est faux
« , ajoute Julie Martinez, avocate et directrice générale de France Positive, toujours auprès de France Inter. Le risque de recourir trop souvent à ces robots conversationnels ? Renforcer l’isolement et la solitude, et un désapprentissage des relations humaines et amoureuses.