Depuis quatre ans, je parcours la France avec le désir de comprendre ce qui nous relie, et ce qui nous sépare désormais. Quelques dizaines de milliers de kilomètres, beaucoup de quais de gare, des métropoles, des villages, des villes moyennes, des quartiers populaires. Des centaines de rencontres et d’entretiens retranscrits sur mes petits carnets remplis d’annotations puis de Post-it. Des cafés, des lycées, des hôpitaux, des marchés, des salles d’attente, des lotos associatifs, des stades de pétanque. Des coiffeurs, des maires, des marchands de fruits et légumes, des passants, des chefs d’entreprise, des chômeurs, des jeunes, des vieux, des fonctionnaires, des médecins, des électeurs d’extrême droite, de gauche, de droite, d’autres qui ne savent pas. Des moments de tension, des instants de rires, beaucoup de craintes, d’espoir aussi, et un flot d’interrogations sur notre avenir.
Un vertige m’accompagne dans ce voyage en France. Comment en vient-on à avoir peur des autres, à ne plus croire dans la promesse de liberté, d’égalité et de fraternité d’un pays ? Comment s’effacent les liens qui tissent une société ? Comment divorce-t-on de ses concitoyens ? Pourquoi, enfin, la France, comme d’autres démocraties, ne parvient-elle pas à déboucler cette spirale sans fin des violences, des répressions, des lois plus dures, des prisons remplies, sans que cela paraisse suffisant et que, jamais, en réalité, cela ne soit efficace ? Dans cette histoire, les banlieues populaires jouent un rôle essentiel. (…)
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