Les supporteurs de Lille vont devoir trouver une autre solution que d’allumer leur téléviseur et de se brancher sur Canal+ pour suivre la rencontre de Ligue Europa opposant leur équipe aux Young Boys de Berne, jeudi 11 décembre (coup d’envoi à 18 h 45, en Suisse). La chaîne cryptée, qui diffuse les Coupes d’Europe de football en France, ne retransmettra pas le match sous peine de s’exposer à une forte amende, pouvant s’élever jusqu’à 100 000 euros.
La raison ? Le sponsor maillot de l’adversaire du LOSC, la firme Plus500, qui « propose à ses clients une gamme de produits de trading, notamment les contrats pour la différence [dits CFD, pour « Contracts for Difference »] et le courtage d’actions », ainsi que le précise son site Internet. Or, les CFD sont considérés par l’Autorité française des marchés financiers (AMF) comme des produits « très risqués » et, à ce titre, visés par la loi Sapin II de décembre 2016, qui en interdit la publicité « directe ou indirecte » dans le pays.
L’affaire n’est pas nouvelle. En mai 2018, M6, codiffuseur avec BeIN Sports de la finale de la Ligue Europa opposant l’Olympique de Marseille à l’Atlético de Madrid – alors parrainé par Plus500 –, avait reçu une première alerte du Conseil supérieur de l’audiovisuel (devenu, en 2022, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle), après une plainte de l’Association française des courtiers et prestataires de services d’investissement.
Cependant, la programmation télévisuelle du match avait été maintenue. Ce qui n’a pas été le cas des rencontres de l’Atalanta Bergame en Serie A, le championnat italien de première division, lors de la saison 2022-2023, auxquelles BeIN Sports a dû renoncer pour les mêmes raisons – depuis, le club a changé de sponsor.
Surtout, en début d’année 2025, Canal+ avait été rappelé à l’ordre par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pour avoir diffusé en direct des rencontres des Young Boys – alors en Ligue des champions – et du Legia Varsovie en Ligue Conférence, et pour avoir laissé « lisible » le nom de la société sur les maillots des joueurs dans les résumés mis en ligne dans la foulée. L’administration avait alors exhorté le groupe à « cesser ces pratiques », ce qu’il avait fait. Les matchs des Bernois face au Celtic Glasgow et à l’Etoile rouge de Belgrade, à la fin de janvier, n’avaient pas été accessibles sur les écrans français, pas plus que le quart de finale entre les Polonais du Legia et Chelsea, en avril.
Un floutage impossible « en direct »
Consciente du problème que pose cette législation, l’Union des associations européennes de football avait prévu de donner un coup de pouce aux clubs français et à Canal+, en plaçant les affiches problématiques assez tard dans le calendrier de la première phase de la compétition, le temps, pour le diffuseur, de trouver une solution. En vain. Pour permettre la retransmission, les équipes concernées par un sponsoring interdit devraient accepter de jouer avec des maillots ne comportant pas le nom de la firme incriminée, ce qui est peu probable au vu des sommes engagées dans ce type de partenariats.
« On va essayer de faire le maximum pour couvrir de la meilleure des manières cette rencontre et offrir de la qualité à nos supporteurs qui ne peuvent malheureusement pas suivre le match sur Canal+ », explique au Monde une source au sein du LOSC. Une fois n’est pas coutume, le club nordiste diffusera sur ses comptes Facebook et YouTube un direct audio au cours duquel un commentateur et l’habituel speaker du stade Pierre-Mauroy décriront la rencontre, qui se déroulera dans l’enceinte du Wankdorf de Berne.
La chaîne cryptée, elle, proposera bien un résumé de la rencontre dans l’émission « Soir d’Europe », à 23 heures, au cours de laquelle le sponsor des Young Boys sera flouté. « Ce floutage n’est techniquement pas possible en direct : c’est très lourd en termes de temps, et même pour le faire en post-live », assure-t-on chez Canal+, qui peut craindre que l’absence de retransmission ne pousse ses utilisateurs ou de potentiels futurs abonnés à opter pour des diffusions pirates, toujours plus populaires chez les passionnés du ballon rond.
La chaîne cryptée, qui, à la fin de novembre, a prolongé ses droits de diffusion de l’intégralité des Coupes d’Europe jusqu’en 2031, espère « qu’une solution sera trouvée pour que les supporteurs puissent suivre légalement leurs matchs. » Un pluriel de mise, car l’Olympique lyonnais affrontera, lui aussi, les Young Boys de Berne dans le cadre de la Ligue Europa, le 22 janvier. Il y a fort à parier que ses fans vivront la même mésaventure que leurs homologues du Nord.











