- Dans la culture populaire occidentale, l’araignée est perçue négativement.
- Il n’est donc pas rare de la percevoir plus grande et plus menaçante qu’elle ne l’est vraiment.
- Des chercheurs ont étudié les causes de ce biais perceptif pour mieux comprendre pourquoi les arachnides ont si mauvaise presse.
Qui n’a jamais vu son partenaire ou son enfant sortir de la salle de bain en hurlant qu’il y a une « énooorme » araignée ? Dans la plupart des cas, vous êtes entré dans la pièce et avez observé un tout petit arachnide vaquant tranquillement à ses occupations ou vaguement apeuré par toutes ces vibrations sonores. La raison : notre perception subjective face à ce que nous identifions comme une menace. Des chercheurs se sont penchés sur ce phénomène.
Comment notre subjectivité joue-t-elle sur la taille des araignées ?
Forts d’une approche empirique sur la perception faussement grossie des araignées par ceux qui les craignent, des chercheurs de l’Université d’Haïfa en Israël ont mené une étude, parue en mai 2025 dans la revue Cognition and Emotion
. À trois groupes de personnes (un groupe d’arachnophobes, un groupe d’experts aranéologues et un groupe témoin), ils ont présenté 90 images. Un tiers représentait des araignées, un tiers des guêpes et un tiers des papillons. Il fallait estimer la taille de chaque animal. D’après les résultats, les personnes qui n’aiment pas les araignées les ont perçues 1,17 fois plus grosses que les papillons alors que les spécimens en question sont réellement plus petits. Cela montre que l’émotion négative suscitée prend le dessus sur la réalité. De leur côté, les experts en aranéologie ont donné des estimations de taille relativement précises, preuve que leurs connaissances zoologiques surpassent tout biais perceptif. Quant aux membres du groupe témoin, ils ont répondu que les papillons et les araignées faisaient la même taille.
Pourquoi l’araignée suscite-t-elle une telle aversion ?
Selon la Ligue de la Protection des Oiseaux (LPO), la moitié de la population française serait rebutée par les araignées. Nous serions même 5% à souffrir d’arachnophobie, cette peur irrationnelle de la petite bête impossible à maîtriser et potentiellement handicapante. Pourtant, cet animal est généralement totalement inoffensif. Sur les 52.310 espèces recensées dans le monde, 1.640 seulement évoluent dans l’Hexagone. Et à part une poignée de spécimens venimeux comme la veuve noire et la recluse, il n’y a aucun danger. Alors d’où vient cette crainte si populaire ? D’après Christine Rollard, spécialiste des araignées et maître de conférences au Muséum national d’Histoire naturelle, interrogée par L’Actu
, l’araignée ne fait jamais partie des « gentils ». Dans les romans et les films, elle est menaçante, agressive, prête à engluer le héros dans sa toile et, surtout, toujours démesurément grande. On la retrouve ainsi dans les films d’horreur tels qu’Arachnophobia
, mais aussi dans Harry Potter et la Chambre des Secrets
, dans le troisième volet du Seigneur des Anneaux
, dans l’aventure de Tintin L’Étoile mystérieuse
. Chez Marvel, elle est minuscule, mais responsable de la mutation de Peter Parker en Spider-Man. Au-delà de la fiction, la mauvaise réputation de la petite bête à huit pattes est bien ancrée dans l’imaginaire populaire occidental, et ce, depuis l’Antiquité. Elle est associée au monde de la nuit, au surnaturel, à la sorcellerie, complète la spécialiste, ainsi qu’à la maladie et à la mort au Moyen Âge.
Ces lieux où l’araignée est appréciée
Dans d’autres cultures que la nôtre, l’araignée est respectée, voire vénérée. Les peuples d’Amérique du Sud s’acclimatent de la présence des mygales, les Cambodgiens font frire les tarentules, transformées en mets raffinés. Le dieu africain Anansi est un homme-araignée qui fait le lien entre les astres et la terre, apprend aux hommes à semer des graines et leur apporte la pluie. De leur côté, les Polynésiens comptent Nareau, le Seigneur araignée, dans leur panthéon des dieux fondateurs. Le rejet de l’araignée est donc avant tout culturel. Alors avant de l’écraser ou de l’atomiser avec un pesticide chimique, n’oubliez pas qu’elle est discrète, inoffensive et pas du tout agressive. En plus, elle nous débarrasse volontiers de nombreux nuisibles comme les moustiques et les mouches !