Il ne faut jamais désespérer de rien. Au moment où le « conclave » sur les retraites semblait voué à disparaître sous les coups de butoir du premier ministre, le processus s’est remis en mouvement cahin-caha sans savoir exactement quel chemin il empruntera ni où celui-ci le mènera. Une volonté s’est affirmée émanant de la CFDT et du Medef. Dans le marasme politique et budgétaire ambiant, c’est presque miraculeux.
Le « conclave » sur les retraites était un curieux objet politique concocté par François Bayrou, peu après sa nomination en janvier, pour convaincre les socialistes de ne pas le censurer, contrairement à ce qu’ils avaient fait quelques semaines plus tôt avec Michel Barnier, entraînant la chute de son gouvernement. Le « deal » était de laisser le patronat et les syndicats rediscuter de la très contestée réforme des retraites de 2023, qui continue d’être vécue comme une « blessure démocratique » par l’ensemble des partis de gauche et par l’intersyndicale qui l’avaient obstinément combattue.
Dans le cas où une entente serait impossible, le départ à la retraite à 64 ans serait acté. La démarche était censée remettre en selle les syndicats, qui s’étaient sentis particulièrement maltraités par Emmanuel Macron. Elle s’est rapidement transformée en un jeu de dupes tant la contrainte budgétaire s’est révélée forte et la pression politique omniprésente.
Après leur avoir fait miroiter une discussion « sans aucun totem et sans aucun tabou », François Bayrou leur a demandé de ne pas « dégrader » l’équilibre financier du système, puis de le rétablir à l’horizon de 2030. Il est vrai que la Cour des comptes, mandatée pour évaluer la situation financière du régime, venait d’estimer le montant du déficit à 15 milliards d’euros à l’horizon de 2035 et à 31 milliards d’euros dix ans plus tard.
Clarifications
L’estocade a été portée, dimanche 16 mars, lorsque, longuement interrogé sur France Inter à propos des menaces géopolitiques qui pèsent sur l’Europe et la France, le premier ministre a expliqué que « la stratégie du gouvernement [était] de remettre les Français au travail et de produire plus ». Dans un tel contexte, revenir à la retraite à 62 ans ne lui semblait « pas possible ». Mais qui croyait encore à cette fable ? Emmanuel Macron n’avait en réalité aucune intention de laisser détricoter la réforme des retraites. Quant au président du parti Horizons, Edouard Philippe, il avait dit tout haut ce que beaucoup dans le bloc central pensaient tout bas : dans le contexte actuel, le « conclave » sur les retraites était « complètement hors-sol ».
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