C’est un système d’une ampleur « sans précédent » téléguidé depuis la Russie. Des Moldaves ont reçu un total de plus de 15 millions de dollars pour voter contre la présidente pro-occidentale Maia Sandu et l’adhésion à l’Union européenne (UE) le 20 octobre, a révélé la police, jeudi 3 octobre.
Cette somme, qui correspond à 13,6 millions d’euros, a été versée au cours du seul mois de septembre, a annoncé jeudi le chef de la police, Viorel Cernauteanu, lors d’une conférence de presse dans la capitale, Chisinau. Il a décrit un phénomène inédit par son échelle, avec plus de cent mille personnes impliquées, visant à « perturber le processus électoral ».
Selon des documents découverts par les enquêteurs, « l’organisation criminelle dirigée par Ilan Shor a recruté des personnes prêtes à voter en échange d’argent » pour un candidat désigné la veille par le biais du réseau social Telegram. Cet oligarque en fuite, condamné l’an dernier par contumace pour fraude, avait annoncé en avril, depuis Moscou, la création d’une coalition des partis prorusses de Moldavie.
Le réseau, « dont certains membres sont situés en Russie », fonctionne selon « une structure hiérarchique bien organisée », a détaillé la police dans un communiqué. Sous la supervision de cent trente chefs territoriaux, ont été enrôlés 70 000 « sympathisants » payés de 46 à 93 euros par mois pour glisser un bulletin anti-occidental dans l’urne le jour J.
Mise en garde contre un « complot » russe
Ils étaient aussi appelés à voter non au référendum sur l’UE, organisé le même jour que l’élection présidentielle. Au total, vingt-cinq perquisitions ont été menées jeudi, permettant de saisir des « téléphones portables et des sommes d’argent en différentes devises ». Tous les paiements effectués sont « légaux », a réagi sur Telegram Ilan Shor, accusant la Moldavie de devenir « un Etat policier » et appelant ses troupes à « poursuivre le combat ».
La Moldavie, longtemps dans l’orbite du Kremlin, nichée entre la Roumanie et l’Ukraine en proie à l’invasion russe, a entamé un virage vers l’Ouest sous la présidence de Mme Sandu, favorite du scrutin. La dirigeante accuse régulièrement la Russie de mener une « guerre hybride » dans cette ex-République soviétique candidate à l’UE, une inquiétude relayée par le Conseil de l’Europe et ses alliés occidentaux.
En juin, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et le Canada avaient mis en garde contre un « complot » russe visant à influencer l’élection présidentielle et à « susciter des manifestations » si un candidat prorusse ne l’emportait pas. Selon le groupe de réflexion moldave WatchDog, la Russie a dépensé plus de 100 millions de dollars cette année à l’approche des scrutins.