Célèbre cartomancienne de la première partie du XIXe siècle, Marie-Anne Lenormand était consultée par le Tout-Paris.
Sa tombe au cimetière du Père-Lachaise est toujours fleurie, à n’importe quelle saison.
Elle a donné son nom à un célèbre oracle, plébiscitée par les adeptes de cartomancie.
Si vous vous promenez dans les allées du cimetière du Père-Lachaise, il y a probablement une tombe qui attirera forcément votre attention. Située non loin de l’entrée principale, dans la très exiguë troisième division, cette sépulture est toujours fleurie. Qu’importe la saison, on y trouve des fleurs, des grigris, des jeux de cartes qui portent le nom « grand » et « petit Lenormand ». Cette tombe appartient à Marie-Anne Lenormand, célébrissime cartomancienne consultée par « le Tout-Paris du Directoire, puis par Louis XVIII à la Restauration », explique Guillaume Bertrand dans son livre « Légendes de Paris ».
La voyante du Tout-Paris
Décédée en 1843, Mademoiselle Lenormand, native d’Alençon, est sans doute la « voyante » la plus connue de la première moitié du XIXe siècle. Elle se passionne très jeune pour la divination, les tarots et les oracles. Placée dans un couvent, elle développe, selon la légende, des dons de voyance et joue les prophétesses, ce qui déplaît (évidemment) aux membres qui finissent par la renvoyer. C’est alors qu’elle décide de monter à Paris, à 14 ans, et trouve une place dans une librairie, en tant qu’apprentie. Plus tard, elle ouvre son bureau de voyance dissimulé sous sa propre librairie. Le hasard fait qu’elle croise trois célèbres noms bien connus de l’histoire de France : Saint-Just, Marat et Robespierre à qui elle prédit l’échafaud, raconte l’association Amis et Passionnés du Père-Lachaise (APPL). « Tous les personnages les plus influents de la Révolution se rendaient pour une consultation de voyance« , écrit le guide Guillaume Bertrand. Elle reçoit des hommes politiques, des peintres, des acteurs, mais aussi… la princesse de Lamballe, directrice de la maison de la reine Marie-Antoinette, ou encore Joséphine de Beauharnais. L’impératrice deviendra même sa confidente… mais elle ira jusqu’à publier « un ouvrage révélant les secrets de l’infertile impératrice« , indique l’APPL. Mademoiselle Lenormand suscitera les inquiétudes de Napoléon, qui la fera d’ailleurs arrêter et enfermer plusieurs fois.
La petite histoire dans la grande histoire
Si elle est connue, par les adeptes de la cartomancie, pour les oracles qui portent son nom, Mademoiselle Lenormand a exploré différentes techniques de divination : Tarot, ligne de la main, plomb fondu, marc de café. On raconte même qu’elle avait des dons de nécromancie. « Elle forge peu à peu sa propre légende à travers les livres qu’elle publie tout au long de sa vie, si bien qu’il est difficile aujourd’hui de distinguer le vrai du faux concernant son parcours et ses exploits« , souligne le podcast « Une histoire particulière, un récit documentaire en deux parties » de France Culture. Après un ultime passage en prison, Anne-Marie Lenormand quitte la capitale, à la tête d’une immense fortune, pour retourner dans sa ville natale. À sa mort, en juin 1843, des funérailles grandioses sont organisées, preuve de son immense renommée. Les cartiers parisiens en profiteront d’ailleurs pour vendre des jeux prétendument créés par la cartomancienne : le grand Lenormand et le petit Lenormand. Des jeux de cartes que certains adeptes déposent encore aujourd’hui sur sa tombe « afin qu’il soit chargé et guidé par l’esprit de celle qui prophétisait à l’oreille des puissants », écrit Guillaume Bertrand.