Du Sénégal au Tchad, le « souverainisme » agite les discours politiques. Au Mali, au Niger et au Burkina Faso, les putschistes en ont fait un levier de légitimation de leur pouvoir. Les trois pays ont ainsi rompu, le 29 janvier, avec la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), accusée d’être le relais des intérêts de la France, pour créer leur propre organisation, l’Alliance des Etats du Sahel (AES).
Mais au-delà des régimes militaires, cette promesse d’émancipation s’étend aux pays démocratiques. Au Sénégal, le président Bassirou Diomaye Faye a réclamé fin novembre, comme ailleurs au Sahel précédemment, le départ de l’armée française.
Rahmane Idrissa, politologue à l’African Studies Centre de Leyde (Pays-Bas) et à l’Africa Institute de Charjah (Emirats arabes unis), revient sur les mutations politiques en cours au Sahel et les limites du discours « souverainiste ».
D’où vient la fièvre souverainiste qui, du Sénégal au Tchad, traverse le continent africain ?
Elle est née d’une panique, au Mali, après la crise sécuritaire de 2012. Face à la multiplication des intervenants extérieurs – Cedeao, France, ONU – pour lutter contre les groupes armés, un fort sentiment de dépossession a gagné la population. Cet affolement a abouti à la prise de pouvoir des militaires en août 2020. En renversant le président Ibrahim Boubacar Keïta, ils ont promis aux Maliens de « restaurer l’Etat et la nation ». Cela signifiait chasser les soldats étrangers et faire sauter les verrous de l’Etat de droit promus par les partenaires occidentaux.
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