En entrant dans le camion, les lycéens ont le sourire aux lèvres, l’air de ceux que rien n’impressionne. Ils cavalent sur le tapis de course, pédalent à toute berzingue sur le vélo et se fendent même de quelques pompes. Jusqu’au moment où l’un d’entre eux demande à sortir, mal à l’aise. Ces élèves testent en réalité une expérience unique au monde : une chambre climatique mobile, chauffée à 50 °C, afin de « s’immerger dans le climat du futur ».
« Ce n’est que lorsqu’on est touchés d’un point de vue émotionnel que l’on peut agir et changer nos comportements. Les informations ne suffisent pas », estime Christian Clot, créateur de l’installation, baptisée Climate Sense. L’explorateur-chercheur et directeur de l’Human Adaptation Institute a lancé le concept en 2021, mais ne le fait essayer au grand public que depuis quelques semaines. Du 30 septembre au 3 octobre, c’est au cœur de Batimat, le Salon des professionnels de la construction, à Paris, qu’il attire les visiteurs, avec cette question intrigante : « Oserez-vous tester la vie à 50 °C ? »
Si le mercure grimpe d’ores et déjà à de telles extrémités en Inde, au Pakistan ou au Mexique, en France, des pointes à 50 °C pourraient être atteintes dans plusieurs régions après 2050, avec la trajectoire actuelle de réchauffement.
A l’intérieur du camion, c’est le choc, comparé aux 15 °C extérieurs. La chaleur est similaire à celle d’un sauna, mais « les gens restent plus longtemps, sont habillés et surtout on leur demande une activité physique et intellectuelle. C’est donc bien plus dur », assure Christian Clot. L’air est sec, en revanche, avec 20 % d’humidité. Après dix minutes de marche ou de vélo, pour simuler un déplacement du domicile au travail, les participants sont invités à effectuer des jeux d’adresse puis à répondre à un questionnaire afin d’évaluer leurs capacités cognitives. Les tests se font sur papier car les ordinateurs et téléphones portables rendent l’âme au bout de quelques heures sous l’effet de la chaleur. Après les trente minutes d’expérience, la température corporelle a grimpé d’environ 1,5 °C.
« Ce n’est pas trop tard »
« C’était insupportable ! », lance l’un des élèves de la classe de 1re du lycée professionnel Le Champ-de-Claye, situé à Claye-Souilly (Seine-et-Marne). Laurine Vauchel, la responsable du bureau des entreprises de l’établissement, dit avoir « pris une claque en entrant ». « Je n’avais plus envie de rien faire et j’avais la respiration difficile. J’ai attendu que cela passe », témoigne-t-elle. Un peu plus tard, Louis-Pascal Soracchi, un retraité, n’observe quant à lui « pas de pertes physiques ou cognitives flagrantes », même s’il doit « relire plusieurs fois les questions ». Encore rouge après l’effort, Florent Létard, ingénieur et architecte, affirme de son côté s’être « senti à l’aise jusqu’à la sortie ». « Mais ce ne serait pas vivable au quotidien », estime-t-il.
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