C’est une date que le Nouveau Front populaire (NFP) a cochée avec une « légère » anxiété : le 31 octobre, lors de sa niche parlementaire, le groupe Rassemblement national (RN) à l’Assemblée nationale va déposer une proposition de loi pour abolir la réforme des retraites adoptée sous le gouvernement d’Elisabeth Borne et rétablir un taux plein au bout de quarante-deux annuités.
Périlleux dilemme : faut-il se cramponner à une position de principe en ne votant aucune proposition de loi qui émane du RN ? Ou soutenir une abrogation promise par le NFP, réclamée par, notamment, le peuple de gauche, qui avait déclenché un mouvement social d’ampleur en 2023, au risque de poursuivre l’entreprise de dédiabolisation et de banalisation du parti d’extrême droite ? Avec un post-scriptum associé à cette seconde option : voter avec le RN, c’est autoriser celui-ci à reprendre le flambeau d’un combat qu’il n’a soutenu ni à l’Assemblée nationale, ni dans la rue.
Comme redouté, le cas de conscience n’a pas encore été réglé par l’intégralité des membres de l’alliance. Seul le Parti socialiste (PS) a arrêté sa position, mardi 24 septembre : il ne votera pas le texte du RN, alors que « le RN a tergiversé pendant toute la campagne des législatives sur ce sujet, [le président du mouvement] Jordan Bardella allant jusqu’à proposer la retraite à 66 ans ». Mais le parti à la rose ne dit pas pour autant qu’il votera contre. « Ce n’est pas encore arbitré. Il y a aussi la possibilité de ne pas prendre part au vote », précise le député du Calvados Arthur Delaporte.
Marine Le Pen a aussitôt réagi à la décision du PS en jugeant que « les Français, qui se sont massivement mobilisés pour l’abrogation d’une réforme, socialement injuste et économiquement inutile, sont une fois encore les otages du sectarisme, de la duplicité et de l’insincérité d’une gauche, multirécidiviste du coup de poignard dans le dos des travailleurs français ».
« Coup médiatique du RN »
Espérant prendre le RN de court, le PS va proposer « en octobre, une abrogation de cette réforme lors de l’examen du budget de la Sécurité sociale », qui intervient avant la niche RN. Une procédure complexe et incertaine. « Cette décision concilie notre désir d’abroger une réforme qui est un marqueur fort pour notre électorat, avec le maintien d’une position de principe ancienne consistant à maintenir un cordon sanitaire autour du RN », analyse Laurent Baumel, député (PS) d’Indre-et-Loire.
Les autres partenaires du NFP demeurent taraudés par une interrogation majuscule. « On n’a pas tranché notre position, admet Stéphane Peu, député communiste de Seine-Saint-Denis. Car on voit l’inconvénient : créditer le RN d’une victoire sociale. Mais je veux aussi pouvoir regarder mes électeurs en face. Et ce qui compte pour eux, avant tout, c’est l’abrogation de la réforme des retraites, le plus vite possible… »
Il vous reste 57.59% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.