Sanctionnée lourdement par la Maison Blanche, l’université de Columbia n’a pas tardé à réagir pour tenter d’inverser la situation. L’institution privée new-yorkaise, accusée par Donald Trump d’avoir laissé prospérer des manifestations propalestiniennes sur le campus, a annoncé, vendredi 21 mars, qu’elle allait engager des réformes drastiques.
L’accord est détaillé dans une lettre envoyée à l’administration du président américain qui avait donné une semaine à la prestigieuse université pour accepter ces dispositions si elle voulait ouvrir des négociations en vue d’obtenir à nouveau les 400 millions de dollars (368 millions d’euros environ) de subventions fédérales coupées par Washington depuis le retour au pouvoir du républicain. Ce dernier reproche à Columbia de ne pas avoir assez protégé ses étudiants juifs lors de manifestations jugées antisémites.
L’université, qui n’évoque jamais la question financière dans sa lettre, se dit prête à revoir totalement sa gestion des mouvements de protestation étudiants, à formaliser une définition de l’antisémitisme.
Supervision de certains départements d’études
Columbia, devenu depuis plus d’un an l’épicentre universitaire des manifestations contre la guerre menée par Israël à Gaza, a également écrit qu’elle allait se doter d’un nouveau service d’ordre, en embauchant « trente-six agents spéciaux » en cours de formation qui auront la possibilité d’« arrêter » des personnes ou de les expulser du campus quand cela sera jugé « approprié ». Le port du masque sera banni, sauf exceptions liées à des raisons sanitaires notamment, ajoute l’université, invoquant des questions de sécurité.
La réforme qui inquiétait le plus le corps professoral depuis la missive gouvernementale, notamment en matière d’indépendance académique, est celle des départements d’étude ciblés. Sur ce sujet, Columbia va nommer un vice-recteur en charge de superviser les départements sur le Moyen-Orient, l’Asie du Sud et l’Afrique, que le gouvernement américain souhaitait placer sous « tutelle académique ».
Il sera chargé de mener une « évaluation approfondie du portefeuille de programmes », en « commençant immédiatement avec le Moyen-Orient ». En particulier, insiste Columbia, l’évaluation portera sur le Centre d’études palestiniennes et l’Institut d’études israéliennes et juives.
Se sentir « bienvenu et en sécurité »
L’objet des réformes annoncées est que « chaque étudiant, professeur et membre du personnel se sente bienvenu et en sécurité sur notre campus », a justifié, vendredi, dans un communiqué la présidente par intérim de Columbia, Katrina Armstrong. « Nous sommes guidés par nos valeurs, plaçant la liberté académique, la liberté d’expression, la recherche ouverte et le respect de tous au premier plan de chacune de nos décisions », a-t-elle écrit.
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Le gouvernement américain n’a pas réagi publiquement en début de soirée vendredi à cette lettre, notamment pour dire si ces termes sont suffisants pour lever les sanctions financières, mais c’est la première fois en plusieurs semaines de bras de fer que Columbia semble s’aligner sur la ligne de Donald Trump.
Sa prise de position était scrutée par l’enseignement supérieur aux Etats-Unis, où les principales universités comme Harvard ou Stanford ont également été menacées par Donald Trump de subir les mêmes coupes claires et représailles si elles ne se conformaient pas à ses directives.
La pression s’était accentuée sur Columbia ces derniers jours, depuis que la police fédérale de l’immigration a arrêté début mars et placé en détention en vue de son expulsion une figure des manifestations propalestiniennes sur le campus, Mahmoud Khalil. L’affaire fait toujours l’objet d’une bataille judiciaire mais l’arrestation du jeune homme, pourtant titulaire d’une carte verte de résident permanent et qui était devenu un porte-parole du mouvement étudiant à Columbia, a choqué aux Etats-Unis, notamment parmi les défenseurs de la liberté d’expression.