Sanofi tourne la page du Doliprane. Après plus d’un demi-siècle dans le giron du laboratoire pharmaceutique tricolore, l’iconique petite boîte jaune s’apprête à quitter sa maison mère pour entamer une nouvelle vie sous la houlette du fonds d’investissement CD & R. Selon nos informations, Sanofi a choisi d’engager des négociations exclusives avec le fonds américain afin de lui céder sa filiale de santé grand public, Opella, pour plus de 15 milliards d’euros.
Le conseil d’administration de Sanofi a tranché, jeudi 10 octobre, parmi les deux offres en lice. Celle de CD & R, d’un côté, et celle du fonds d’investissement français PAI Partners. C’est le prix, semble-t-il, qui a été déterminant. Le fonds américain offrait une valorisation supérieure à celle de PAI. Ce dernier, en revanche, avait apporté des engagements sociaux conséquents. Le fait que PAI soit un acteur français aurait pu lui conférer un avantage non négligeable, afin de conserver sous pavillon tricolore le Doliprane, le médicament le plus consommé en France.
Pour autant, en choisissant un fonds américain, le conseil d’administration a semblé désireux de donner à ses actionnaires internationaux un gage d’indépendance par rapport aux autorités françaises. Un geste d’autant plus facile dans un contexte politique chahuté, avec un gouvernement fragile.
Présent dans 150 pays
L’ancrage français d’Opella est assuré à court terme. Sanofi conservera, en effet, environ 50 % du capital encore quelques années, avant de se désengager probablement d’ici à cinq ans. Bpifrance devrait participer dans un second temps au tour de table. Cette opération sera soumise au contrôle des investissements étrangers, la santé faisant partie des secteurs où la France a mis en place des garde-fous pour protéger sa souveraineté, notamment en matière de sécurité d’approvisionnement.
Si ce rachat va à son terme, CD & R mettra la main sur un paquebot de 11 000 salariés, présent dans 150 pays avec plus d’une centaine de marques, dont le Doliprane, le Dulcolax, la Lysopaïne, ou encore le Maalox, et qui pesait, en 2023, 5,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Sanofi avait annoncé son intention de se séparer de sa filiale de médicaments sans ordonnance et de compléments alimentaires en octobre 2023. Le groupe avait alors justifié son choix de céder Opella par sa volonté de concentrer ses efforts d’investissement sur le développement de médicaments innovants, plus lucratifs. Sanofi avait élaboré deux scénarios potentiels, celui d’une vente ou d’une introduction en Bourse, à l’image du choix opéré par le laboratoire britannique GSK en 2022 lors de sa séparation de sa division santé grand public, Haleon.