Comparer la femme à une fleur est une banalité poétique qui se retrouve dans bien des littératures et des arts. La sculptrice Elsa Sahal s’en saisit à son tour, mais c’est pour la compromettre et l’attirer loin des douceurs amoureuses. De pots ventrus et de vases au long col étranglé sortent des volumes sinueux ou plus réguliers. Ils tiennent du végétal et de l’organique : tubercule ou sein, bouton à peine éclos ou sexe, gousse ou ovaire, tige ou tentacule, feuille ou langue ? Ne serait-ce pas des serpents ou des murènes qui pointeraient leur tête étroite ? La dextérité de l’artiste dans les techniques de la céramique, modelage et cuisson, lui permet de pousser loin la confusion entre les genres. Les couleurs l’aggravent, avec leurs nuances sanguines, d’autres aquatiques et d’autres encore plus blanches et minérales, qui font penser à des coraux et des fossiles. Les surfaces sont lisses comme des peaux ou rugueuses comme des écorces. Parfois, Elsa Sahal greffe à la céramique des protubérances de verre, tout aussi équivoques. D’humeur élégiaque, on peut voir dans ces sculptures florales l’éloge de la nature et de la vie. D’humeur moins paisible, on s’interroge sur l’histoire et la symbolique de ces bouquets d’éléments anatomiques fraîchement coupés.
« Les vases sont debout, les potiches ont attrapé des jambes ». Galerie Papillon, 13, rue Chapon, Paris 3e. Jusqu’au 17 mai. Du mardi au samedi de 11 à 19 heures. Galeriepapillonparis.com