Enfin un artiste met à l’épreuve les pouvoirs visuels de l’intelligence artificielle sans se laisser fasciner. Depuis ses débuts, il y a une décennie, Emo de Medeiros s’empare des techniques à mesure qu’elles sont inventées et les confronte à ses sujets d’artiste franco-béninois. Il continue donc, selon un processus complexe. Il a commencé par charger sur ChatGPT 333 de ses dessins, puis demandé à trois autres IA génératives d’en déduire des œuvres à sa manière, les perfectionnant jusqu’à obtenir des créations impossibles à distinguer des originaux – mais qui n’en étaient pas. Il a ensuite brûlé les 333 originaux, puis imprimé ceux qu’ont produits les machines sur du papier à dessin et les a retravaillés avec le charbon obtenu par la combustion des premiers, des pastels, des feutres et des stylos Bic. Que voit-on pour finir ? Des fantaisies graphiques sur les thèmes tels que l’éléphant, le lion ou l’homme, qui sont à la fois des images de synthèse et des graffitis, du numérique et du préhistorique. Peut-être est-ce le début d’un nouveau mode de création : l’IA assistée et détournée par l’homme, et non plus l’inverse. A ces œuvres chamarrées est ajoutée une vidéo en noir et blanc, projet en cours. L’IA y est présente, mais aussi l’histoire du cinéma, une mémoire qui n’oublie ni le nazisme ni la ségrégation raciale et une symbolique où le veau d’or devient cochon ailé que menace un terrible tigre-robot. On en reste pantois.
« IAMAI ». Galerie Dominique Fiat, 16, rue des Coutures-Saint-Gervais, Paris 3e. Jusqu’au 6 juillet, du mardi au samedi de 11 heures à 19 heures.