Le 1ᵉʳ novembre, à Flourens, près de Toulouse, Olivier Le Bossé perdait son fils ainé, Quentin, 28 ans, fauché à vélo par un chauffard. L’homme conduisait sous l’emprise de la cocaïne, un délit pour lequel il avait déjà été contrôlé quelques mois plus tôt.
En colère, le père de famille dénonce un laxisme judiciaire, dans le portrait de la semaine de Sept à Huit.
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Sept à huit
C’est le drame de sa vie. Son fils, Quentin, un ingénieur de 28 ans, a été mortellement fauché à vélo, le 1ᵉʳ novembre dernier à Flourens (Haute-Garonne), près de Toulouse. L’automobiliste responsable conduisait sous l’emprise de la cocaïne, délit pour lequel il avait déjà été condamné un an auparavant. Pour Olivier Le Bossé, père de famille endeuillé, plus rien ne sera comme avant, comme il le dit à Audrey Crespo-Mara pour Sept à Huit.
Il détaille les circonstances de l’accident : « Mon fils revenait d’une promenade à vélo avec son amie et sur le chemin du retour, sur une départementale, il s’est présenté une côte. Son amie lui a dit : ‘va devant, fais-toi plaisir, monte parce que moi, je monterai moins vite’. Donc, il est parti, mais pas comme un fou furieux. C’était quelqu’un de très prudent. Il portait son casque, il portait un gilet jaune, des gants jaunes pour être tout à fait visible des conducteurs. Mais une voiture a doublé son amie et quand elle est arrivée en haut de la côte, elle a vu Quentin dans le fossé. Les yeux mi-clos, m’a-t-elle dit, respirant faiblement. Elle lui a dit : ‘tiens bon’ et malheureusement, il est parti au bout de quelques souffles.
La condamnation a été sans effet parce qu’un an après, on le retrouve au volant sous cocaïne.
La condamnation a été sans effet parce qu’un an après, on le retrouve au volant sous cocaïne.
Olivier Le Bossé
La jeune femme n’a pas assisté directement à la collision. Il est donc difficile de savoir exactement ce qui s’est passé. Olivier Le Bossé indique qu’une « instruction est ouverte ». « Ce que je sais, c’est que le conducteur qui a percuté violemment par l’arrière le vélo de mon fils, il l’a éjecté, a une petite quarantaine et est artisan électricien. Il conduisait une voiture allemande puissante et a été testé positif à la cocaïne (…). Ce qui est terrible, c’est que ce n’est pas la première fois puisqu’il y a à peu près un an, cet individu, ce tueur, je dirais, a été contrôlé positif à la cocaïne et à l’alcool. C’est ce qu’on appelle un récidiviste », s’insurge-t-il, ajoutant que « la condamnation a été sans effet parce qu’un an après, on le retrouve au volant sous cocaïne ». « Quelle était la sanction, on ne le sait pas », lâche-t-il.
« Retrouver quelqu’un qui a été condamné un an après sous cocaïne, c’est quand même difficile à comprendre, donc c’est pratiquement de fait un permis de tuer qui lui a été délivré », dénonce-t-il, estimant que les sanctions antérieures n’étaient pas assez sévères pour empêcher un tel événement tragique. « C’est très fort, mais c’est le terme qui convient. On laisse des gens, en connaissance de cause, conduire sous cocaïne. On les laisse récidiver. Y a-t-il un suivi de ces personnes ? Des contrôles réguliers ? Visiblement non », insiste-t-il. De son côté, le conducteur du véhicule aurait affirmé ne pas avoir vu le cycliste à cause du soleil. « Moi, je dis que s’il n’avait pas été sous cocaïne et en plus, s’il n’avait pas été au téléphone, peut-être n’aurait-il pas été ébloui », répond le père.
« Il est parti trop tôt »
L’instruction judiciaire se poursuit, et l’automobiliste, présumé innocent, est poursuivi pour homicide involontaire. Il a été placé sous contrôle judiciaire, mais « il est ressorti libre », précise le père de famille. « Il n’a même pas de bracelet électronique, rien. Peut-il conduire ? Peut-il vaquer à ses occupations librement ? Prendre les siens dans ses bras ? On peut le supposer », regrette-t-il. « Mon fils, lui, est enfermé dans une boîte qu’on appelle une tombe ».
« Le vélo était une de ses passions. Il ne se déplaçait quasiment qu’à vélo dans la métropole toulousaine, par goût, mais aussi par conviction écologique. Il se rendait quotidiennement à son travail à bicyclette. Il a même entamé un Tour de France seul qu’il a interrompu au bout de 2.000 km pour cause de confinement. Et plus récemment, il a réalisé le Tour de Suisse avec près de 1.000 km, donc c’était vraiment un passionné », raconte le père de famille. Il poursuit les larmes aux yeux : « C’était Quentin, 28 ans, aimant le sport, ses amis. Il est parti trop tôt ».
« Je veux que ce jugement serve d’exemple et qu’il fasse réfléchir la société et nos politiques sur la nécessité de faire évoluer cette loi, qui qualifie un tel acte d’homicide involontaire, en homicide routier. Mais cela ne suffit pas », martèle-t-il. Depuis la mort de son fils Antoine, alors âgé de 24 ans, le chef Yannick Alléno est également devenu un ardent défenseur de la création d’un délit d’homicide routier. Une proposition de loi devait être examinée à l’Assemblée nationale avant sa dissolution en juin. Toutefois, Olivier Le Bossé souhaite que cette terminologie « s’accompagne d’un alourdissement des sanctions pour que vraiment ce soit exemplaire ». « On se bat pour que de tels actes ne se reproduisent plus (…) Cet individu a tué un avenir (…) Il a ruiné plusieurs vies », conclut-il.