Le débat sur la définition du viol semble sans issue. Récemment encore, la proposition d’inscrire l’absence de consentement dans cette définition, issue du rapport de Véronique Riotton [députée Renaissance de Haute-Savoie] et Marie-Charlotte Garin [députée Les Ecologistes du Rhône] pour la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, s’est attiré la vive riposte d’un collectif d’associations et de députées dans une tribune parue dans Le Monde le 17 février.
Pourtant, à lire de près les nombreux textes publiés par des féministes et des juristes depuis quatre ans, l’impression est bien plus positive. Non seulement ce débat est constructif et nourri d’arguments étayés, mais il est aussi très soucieux de la réalité concrète des parcours des victimes et des problèmes rencontrés. Cette qualité du débat démocratique, entre des personnes qui ont toutes à cœur de mieux lutter contre les violences sexuelles, a permis que les points de vue se rapprochent sur des points essentiels. C’est pourquoi je soutiendrai ici que, sur la définition pénale du viol, un consensus est possible. Je crois même qu’il suffirait de peu pour y parvenir.
Rappelons les points d’accord. On reconnaît unanimement aujourd’hui que le mouvement #MeToo a rompu l’ancienne fatalité de la honte et du silence, dénoncé la stigmatisation des victimes, et sorti de l’ombre des milliers de situations où elles n’avaient eu aucune liberté de consentement. La fréquence des cas où un homme n’hésite pas à « présumer » le consentement d’une femme pour forcer le rapport sexuel convoité montre la prégnance des stéréotypes machistes. L’importance de changer la définition du viol, c’est peut-être surtout de « changer de paradigme », selon le mot de Catherine Le Magueresse, dont le livre Les Pièges du consentement (Ixe, 2021) a lancé tout ce débat en France.
Personne ne prétend qu’une nouvelle définition du viol va tout changer. L’évolution de la jurisprudence a déjà permis que, en référence à la « contrainte » ou à la « surprise », on qualifie désormais de viols des actes imposés en situation d’emprise ou de sidération, qui naguère encore seraient passés sous les radars. Et tout le monde redoute une loi d’affichage, si des moyens nouveaux ne sont pas alloués en parallèle à la prévention des violences, à l’accompagnement des victimes, à l’action de la police et de la justice et au développement de la justice restaurative.
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