L’appel est survenu au cœur de l’été 2023. « Bonjour, c’est Thomas Langmann. Vous voyez qui je suis ? Le producteur de cinéma… » Nous avions déjà entendu parler de ce personnage éruptif, aussi admiré que contesté, producteur de films à succès, comme Astérix ou les deux Mesrine, et de spectacles populaires, tel Stars 80. On s’est d’abord méfiés. L’itinéraire cabossé de cet homme singulier, aujourd’hui âgé de 53 ans, incitait à la prudence. Un parcours jalonné de drames familiaux, d’échecs retentissants et de triomphes éclatants, avec, à son apogée, les cinq Oscars décrochés en 2012 pour The Artist. Sans parler des Palmes cannoises, des Césars et autres Golden Globes…
Si vous lui demandez de détailler ce palmarès, Thomas Langmann se montrera intarissable. Sa besace est pleine d’anecdotes sur les figures du cinéma français, mais ce n’était pas l’objet de son appel, ce jour-là. « Je veux révéler un scandale dans le monde de l’art, lance-t-il. Je l’ai découvert en enquêtant sur l’héritage que l’on m’a volé. Celui de mon père, Claude Langmann… » Claude Langmann, plus connu sous le nom de Claude Berri. Un nom magique dans le 7e art, producteur-cinéaste de génie, mais aussi grand collectionneur d’art.
A l’été 2023, les médias avaient déjà évoqué cette affaire. En toile de fond, la famille Langmann, ou ce qu’il en reste, avec ce qu’elle charrie de rumeurs et de fantasmes. Sur le banc des accusés, son demi-frère, Darius Langmann, mais aussi l’écrivaine Nathalie Rheims, dernière compagne de Claude Berri, et des personnalités du milieu de l’art, tous suspectés d’avoir profité des largesses ou des faiblesses du cinéaste, mort en janvier 2009, en lésant au passage son fils Thomas Langmann.
Ces derniers mois, l’affaire ne semblait guère progresser du point de vue judiciaire. Dès lors, fallait-il prendre au sérieux l’appel de l’héritier se disant spolié ? Comment s’y retrouver dans le magma des procédures ? Pour résumer, il y en a deux, et elles ne manquent pas de contradictions. D’un côté, la justice pénale enquête depuis 2019 sur des faits de « vol en bande organisée », de « détournement de fonds » et d’« abus de confiance », à la suite de plaintes déposées par Thomas Langmann. Les derniers actes judiciaires en date dans ce volet pénal, que Le Monde révèle, semblent d’ailleurs donner corps à ses accusations, avec une rafale de gardes à vue et de convocations aux fins de mise en examen attendue en cette fin d’année 2024. Mais, dans le même temps, une autre procédure, au civil cette fois, suit son cours sur des aspects connexes, et rend arrêt sur arrêt pour débouter ce même Thomas Langmann de toutes ses demandes…
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