La visite du président turc Recep Tayyip Erdogan en Irak, lundi 22 avril, suscite l’espoir d’une « nouvelle ère » dans les relations entre la Turquie et l’Irak. Dans une région en pleine reconfiguration, le temps était venu pour les deux voisins de renforcer leur coopération. Depuis la dernière visite de M. Erdogan en Irak, en qualité de premier ministre, en 2011, les contentieux se sont accumulés sur la sécurité régionale, le partage des eaux du Tigre et de l’Euphrate, mais aussi la coopération économique.
Depuis son arrivée à la tête du gouvernement irakien en octobre 2022, Mohammed Chia Al-Soudani a fait de la résolution de ces conflits une priorité, cherchant à bâtir sur les intérêts stratégiques communs. La signature, lundi, d’un accord-cadre stratégique de coopération conjointe, ainsi que de 24 protocoles d’accord dans les domaines de l’énergie, l’eau ou le commerce, place la relation bilatérale sur de nouvelles bases, sans solder encore ces contentieux. Les deux pays partagent des défis sécuritaires et l’impératif de sortir leurs économies du marasme, mais leurs priorités divergent.
Ankara fait de l’élimination du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), une organisation qu’elle considère comme terroriste, et qui est réfugiée dans les monts du nord de l’Irak, son objectif premier. Bagdad, à qui la Turquie a longtemps imposé ses vues en jouant de sa rivalité avec Erbil, la capitale du gouvernement régional du Kurdistan (GRK), veut retrouver sa souveraineté, le contrôle de ses ressources, et sortir son économie de la dépendance à la rente pétrolière.
« J’ai partagé avec mes homologues ma ferme conviction que la présence du PKK sur le territoire irakien prendra fin le plus rapidement, en étant officiellement déclaré organisation terroriste », a plaidé, lundi, M. Erdogan depuis Bagdad. Le président turc aimerait que l’Irak aille au-delà de la simple interdiction du PKK, un premier geste apprécié, consenti en mars. Mais, dans l’esprit de Bagdad, il s’agit plutôt d’empêcher tout militantisme et action armée des membres du PKK, et de leur offrir le statut de réfugiés politiques.
« Opération militaire de grande envergure »
Le gouvernement irakien veut avoir son mot à dire dans les opérations turques en Irak. Il n’a eu de cesse, avec les groupes chiites pro-Iran qui lui sont associés, de dénoncer les violations de sa souveraineté par Ankara. La Turquie a intensifié, ces dernières années, ses opérations contre les cellules du PKK au Kurdistan irakien, et y a installé de nouvelles bases et des avant-postes avec l’appui du Parti démocratique du Kurdistan (PDK) du clan Barzani, qui gouverne le GRK.
Il vous reste 70.06% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.