C’est une carte détaillée et dynamique de la maturation des os et des cartilages chez l’embryon humain qui a été dressée cellule par cellule. Un travail de fourmi, publié dans la revue Nature du 20 novembre et piloté par le Wellcome Sanger Institute, au Royaume-Uni. Il s’inscrit dans le cadre d’un ambitieux projet international, l’Atlas des cellules humaines, lancé en 2017 pour caractériser l’ensemble des types cellulaires de l’espèce humaine et leur évolution au cours du développement normal ou pathologique.
Ici, les chercheurs ont analysé les tissus des membres inférieurs et du crâne d’embryons humains âgés de 5 à 11 semaines, tous issus d’interruptions volontaires de grossesse, au Royaume-Uni et en France. Ces derniers ont été obtenus après consentement écrit et éclairé des donneurs, et avec l’approbation des comités d’éthique ad hoc des deux pays – et de l’Agence de la biomédecine française.
Dans un premier temps, les chercheurs ont isolé et séquencé les acides ribonucléiques (ARN) messagers présents dans les noyaux de 336 000 cellules de ces tissus. Ces ARN messagers, rappelons-le, dressent le tableau des gènes « exprimés », c’est-à-dire traduits en protéines (ou en molécules d’ARN) dans chaque cellule. C’est une carte d’identité de cette cellule, en somme, qui détermine à la fois sa morphologie et ses fonctions propres.
« Des cellules peuvent présenter des morphologies semblables, mais avoir des identités génétiques différentes », relève Alain Chédotal, directeur de recherche à l’Institut de la vision à Paris (Inserm, Sorbonne Université, CNRS) et coauteur. Dans un second temps, les chercheurs ont réalisé une analyse spatiale sophistiquée, positionnant chaque cellule sur des coupes de tissu.
Nouveaux types de cellules dans le crâne
Cet atlas révèle comment, presque partout, les cellules cartilagineuses sont les premières à se développer dans le squelette. Elles servent ensuite d’échafaudage pour la formation des cellules osseuses, qui commence au centre des futurs os du squelette, puis se propage vers leurs extrémités, qui, elles, resteront cartilagineuses.
Cet ordre de différenciation des cellules – cellules cartilagineuses d’abord, puis cellules osseuses – est respecté partout… sauf au sommet du crâne. Dans la voûte du crâne, les chercheurs ont en effet découvert de nouveaux types de cellules osseuses, d’apparition précoce.
Une observation qui prend tout son sens à la lumière d’une particularité de la croissance du crâne humain, en lien avec le développement de notre encéphale. « Le cerveau de l’embryon puis du fœtus humain connaît, à partir de l’âge de 10 semaines, une expansion considérable, rappelle M. Chédotal. Il faut donc que le développement du crâne, qui héberge ce cerveau, soit coordonné à cette expansion. »
Il vous reste 47.97% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.