Deux hauts fonctionnaires ont rendu ce mardi 20 mai un rapport au gouvernement concernant les Frères musulmans.
Ce mouvement défend une vision rigoriste de la religion.
Il se serait implanté en France ces dernières années, au risque « d’une atteinte aux institutions républicaines ».
Le texte sera examiné ce mercredi 21 mai par le gouvernement réuni en Conseil de défense. Et sa conclusion risque bien d’alerter les pouvoirs publics : les Frères musulmans représentent en France « une menace pour la cohésion nationale », avec le développement d’un islamisme « par le bas », au niveau des municipalités, selon les mots du rapport commandé par le gouvernement et cité par l’AFP.
Un mouvement ancré localement
« La réalité de cette menace, même si elle repose sur une temporalité longue et ne recourt pas à l’action violente, fait peser le risque d’une atteinte au tissu associatif et aux institutions républicaines (…) et plus largement à la cohésion nationale », est-il écrit, comme l’a révélé Le Figaro (nouvelle fenêtre). Une menace qui existerait « à court ou moyen terme ».
En France, la mouvance « est établie sur une structuration solide mais l’islamisme politique se diffuse d’abord au plan local », souligne le rapport intitulé « Frères musulmans et islamisme politique en France ». Réalisé par deux hauts fonctionnaires, il insiste sur le « caractère subversif du projet porté par les Frères musulmans« , qui vise « à œuvrer au long cours en vue d’obtenir progressivement des modifications des règles locales ou nationales », notamment celles concernant la laïcité et l’égalité entre les femmes et les hommes.
Il s’agit « non pas de s’enclaver comme le fait de séparatisme » mais au contraire « de dissimulation » pour aller « à la conquête des antennes de pouvoir, notamment les municipalités », croit savoir l’Élysée. Parmi les effets possibles de cette stratégie, le développement de « réseaux œuvrant au repli communautaire, allant jusqu’à la constitution d’écosystèmes islamistes », ajoutent les auteurs.
Aucun document récent ne démontre la volonté de Musulmans de France d’établir un État islamique en France ou d’y faire appliquer la charia
Aucun document récent ne démontre la volonté de Musulmans de France d’établir un État islamique en France ou d’y faire appliquer la charia
Rapport « Frères musulmans et islamisme politique en France »
Emmanuel Macron réunira mercredi à 11h30 plusieurs ministres pour un Conseil de défense qui se penchera sur ce rapport, avec à la clef des mesures dont certaines seront classifiées. Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau s’est inquiété ce mardi d’« un islamisme à bas bruit qui se répand en tentant d’infiltrer les associations » et dont « l’objectif ultime est de faire basculer toute la société française dans la charia ».
Mais selon le rapport, « aucun document récent ne démontre la volonté de Musulmans de France d’établir un État islamique en France ou d’y faire appliquer la charia ». Musulmans de France a succédé en 2017 à l’Union des organisations islamiques de France (UOIF) et « est identifiée comme la branche nationale des Frères musulmans en France », détaille le rapport.
Ce dernier évalue à 139 le nombre de lieux de culte affiliés à Musulmans de France, en plus de « 68 considérés comme proches de la fédération, répartis sur 55 départements ». Cela représente « 7% des 2.800 lieux de culte musulman répertoriés » en France, avec une fréquentation moyenne de « 91.000 fidèles le vendredi ». Mais « un fidèle fréquentant une mosquée de la mouvance n’est pas, loin s’en faut, membre », note l’étude.
Le texte souligne aussi combien les Frères musulmans, « en perte d’influence » dans le monde arabo-musulman, « concentrent leur action sur l’Europe ». C’est pourquoi les deux hauts fonctionnaires plaident pour « poursuivre les efforts de sensibilisation déjà déployés auprès de la Commission européenne ». Enfin, le rapport décrit le secteur éducatif comme une « priorité de la branche française » des Frères musulmans et s’inquiète d’une « rigorisation de la pratique religieuse », avec une « explosion du nombre de jeunes filles portant une abaya ».
Le mouvement des Frères musulmans, né en 1928 en Égypte, porte le projet d’un islam politique conservateur. Il a été interdit dans plusieurs pays, comme l’Arabie saoudite, l’Égypte et très récemment la Jordanie, car considéré comme terroriste.