Une plainte contre la congrégation de Bétharram pour des violences, des viols et des agressions sexuelles sur mineurs au sein de l’établissement Ozanam de Limoges a été classée sans suite, notamment en raison du décès des prêtres mis en cause, a annoncé, vendredi 4 juillet, le parquet.
Emilie Abrantes, procureure de la République de Limoges, a déclaré avoir reçu mardi les plaignants pour « les informer du classement sans suite de la procédure », trois mois et demi après l’ouverture d’une enquête préliminaire confiée au service interdépartemental de la police judiciaire de la ville.
« Les investigations ont permis de recenser neuf témoignages, parmi lesquels sept personnes ont effectivement déposé plainte pour des faits de violences, viols et/ou agressions sexuelles sur mineurs » commis « dans l’enceinte de l’établissement Ozanam » entre 1966 et 1975, déclare la magistrate dans un communiqué.
Les plaignants étaient scolarisés au sein de cet établissement catholique du centre de Limoges, où officiaient des membres de la congrégation mise en cause pour les violences physiques et sexuelles dénoncées à Notre-Dame-de-Bétharram, dans les Pyrénées-Atlantiques.
« Si l’enquête a permis d’établir une concordance entre les différents témoignages, tant sur l’identité des prêtres susceptibles d’être mis en cause, de leur présence effective au sein de l’établissement sur la période considérée, que sur la nature des faits commis, les prêtres concernés sont tous décédés à ce jour », souligne la procureure, constatant « l’extinction de l’action publique ».
« Jusqu’à quand perdurera le système d’impunité ? »
Quatre des plaignants avaient élargi le motif de leur plainte à des faits de « crime contre l’humanité » reprochés à la congrégation des Pères de Bétharram, afin de contourner la prescription. L’infraction de crime contre l’humanité « dans sa rédaction actuelle » ne figure au Code pénal que depuis 1994 et sa rédaction antérieure n’était applicable qu’aux crimes commis pendant la seconde guerre mondiale, rappelle Emilie Abrantes. « Cette infraction ne peut être appliquée à des faits antérieurs à son entrée en vigueur », fait-elle valoir.
« Jusqu’à quand perdurera le système d’impunité ? Pourquoi une plainte sur dix seulement aboutit à une condamnation ? », réagit le collectif des anciens d’Ozanam dans un communiqué adressé à l’Agence France-Presse. « On comprend pourquoi la majorité des victimes ne portent pas plainte et sont abandonnées par la justice ».
Newsletter
« La revue du Monde »
Chaque week-end, la rédaction sélectionne les articles de la semaine qu’il ne fallait pas manquer
S’inscrire
« Aujourd’hui, les actes pédocriminels prolifèrent toujours dans la société en toute impunité (…). Quand la société va-t-elle se soulever ? Le silence n’est plus acceptable, quel que soit le lieu de ces crimes », ajoute-t-il.
Dans l’affaire des violences sexuelles de Notre-Dame-de-Bétharram, qui s’étalent sur un demi-siècle, les victimes, aujourd’hui pour la plupart relativement âgées, butent sur l’écueil des délais de prescription, de trente ans pour les viols. Plus de 200 plaintes ont été déposées à Pau mais, à ce stade, seules deux échappent à la prescription, malgré son élargissement progressif depuis les années 1990.