- L’administration Trump et la mouvance MAGA multiplie les attaques contre la « gauche radicale » après le meurtre de l’influenceur conservateur Charlie Kirk.
- Elles l’accusent de nourrir un climat de violence, alors même que plusieurs données récentes soulignent que les radicaux d’extrême droite sont responsables de la majorité des meurtres extrémistes dans le pays.
- Une réalité que cherche à éclipser le ministère de la Justice, en retirant une étude de ses sites, ou encore Elon Musk, mis dans l’embarras par son propre robot Grok.
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L’info passée au crible des Vérificateurs
Depuis une semaine, les coups pleuvent. Dans le sillage de l’assassinat de l’influenceur conservateur américain Charlie Kirk (nouvelle fenêtre) le 10 septembre dernier, l’administration Trump et plus largement la sphère MAGA (« Make America Great Again ») s’en prend avec virulence à la « gauche radicale »
, accusée d’alimenter un climat de violence. Lundi, le vice-président J.D. Vance a même estimé que « l’extrémisme de gauche »
était en partie responsable de ce meurtre. Au point que ces cercles tentent de dissimuler une réalité embarrassante, à rebours de leur narratif : la grande majorité des meurtres extrémistes sont le fait d’individus d’extrême droite aux États-Unis.
Une stratégie déployée au plus haut niveau. Dans les jours qui ont suivi le meurtre de l’influenceur pro-Trump, une étude portant sur les radicaux d’extrême droite violents a été discrètement retirée des plateformes Internet du ministère de la Justice.
Une étude se volatilise, deux jours après le meurtre de Charlie Kirk
Dès le 13 septembre, un internaute remarque (nouvelle fenêtre) que le document s’est volatilisé. Cette étude du National Institute of Justice (NIJ), une agence du ministère dédiée à la recherche, était notamment disponible sur le site (nouvelle fenêtre) de cette dernière. Dès le premier paragraphe, les auteurs indiquent que « le nombre d’attaques d’extrême droite continue de dépasser tous les autres types de terrorisme et d’extrémisme violent national »
, ajoutant que « l’extrémisme violent militant, nationaliste et suprémaciste blanc a augmenté aux États-Unis »
.
Selon ce document, « depuis 1990, les radicaux d’extrême droite ont commis beaucoup plus d’homicides motivés par l’idéologie que les radicaux d’extrême gauche ou les islamistes radicaux »
. Sur la période, ces attaques ont coûté la vie au total à « plus de 520 personnes »
, contre 78 personnes pour l’extrême gauche.
Mais alors que l’on pouvait retrouver l’étude en long sur une page web du NIJ le 11 septembre, elle était inaccessible dès le lendemain, selon le site d’archivage WaybackMachine (nouvelle fenêtre). À la place, un renvoi vers la page d’accueil du site, avec un message énigmatique : « Le Bureau des programmes judiciaires du ministère de la Justice procède actuellement à la révision de ses sites Web et de ses documents conformément aux récents décrets présidentiels et aux directives connexes »
, rendant « certaines pages et publications »
indisponibles, sans plus de détails. Ce message a désormais disparu.
Ce retrait discret n’a rien d’un hasard. L’étude était aussi accessible sur le site gouvernemental de l’Office of Justice Programs, une agence du ministère de la Justice, avant d’y être également retirée. Toujours selon WaybackMachine, le document en PDF était consultable (nouvelle fenêtre) dans la journée de vendredi 12 septembre… avant de ne plus apparaître (nouvelle fenêtre) quelques heures plus tard. À la place, un message d’erreur à nouveau : « la page demandée n’a pas pu être trouvée »
.
Elon Musk pris de court par son chatbot… qui relaie des données authentiques
Ce n’est pas la première fois que le camp MAGA tente de balayer des informations qui ne servent pas son récit. Elon Musk, ex-allié de Donald Trump mais gravitant toujours dans ces cercles (nouvelle fenêtre), en a offert un aperçu ces derniers jours, après avoir été mis dans l’embarras par Grok, le robot conversationnel de son propre réseau social X.
Le 13 septembre dernier, un internaute a interpellé l’entrepreneur (nouvelle fenêtre) en critiquant des réponses apportées par cet assistant IA. Dans le message incriminé, Grok brosse un portrait rapide de Tyler Robinson, suspecté du meurtre de Charlie Kirk (nouvelle fenêtre), avant une mise en contexte plus large sur la surreprésentation d’individus d’extrême droite parmi les auteurs de meurtres extrémistes ces dernières années dans le pays. Le chatbot « woke »
est devenu « absolument hors de contrôle »
, enrage le compte, à qui Elon Musk répond dès le lendemain : « Mes excuses, nous corrigeons cette idiotie gênante de Grok »
.
Dans le détail, Grok a bien diffusé des inexactitudes concernant le profil de Tyler Robinson, dont les motivations et les appartenances politiques étaient encore plus nébuleuses en fin de semaine dernière qu’aujourd’hui. Mais sur la mise en perspective, il présente en revanche des données authentiques.
Le robot évoque notamment celles de la Ligue antidiffamation (ADL), une association de lutte contre l’antisémitisme et plus largement contre les discours de haine. Ces dernières « montrent qu’environ 75 % des meurtres (perpétrés par) des extrémistes aux États-Unis (2013-2022) sont le fait d’acteurs d’extrême droite »
.
Des chiffres effectivement évoqués par l’organisation dans son rapport portant sur 2022 (nouvelle fenêtre). « Sur les 444 personnes tuées par des extrémistes au cours des dix dernières années, 335 (soit 75%) l’ont été par des extrémistes de droite »
, contre 4% pour l’extrême gauche, est-il indiqué. Ce niveau est même en légère hausse, d’après la dernière étude de l’ADL (nouvelle fenêtre) publiée l’an dernier : entre 2015 et 2024, 76% des meurtres liés à l’extrémisme sont liés à l’extrême droite, contre 4% toujours pour l’extrême gauche.
Grok se reprend, mais maintient le constat sur l’extrême droite
Après le coup de sang d’Elon Musk, Grok semble avoir revu sa copie, mais pas en intégralité. Interrogé lundi par un internaute sur les remontrances de son créateur, il a affirmé avoir été « mis à jour »
et a concédé des « inexactitudes, comme le fait de ne pas refléter les informations sur l’idéologie de gauche du suspect »
du meurtre de Charlie Kirk (nouvelle fenêtre). Des éléments communiqués par le procureur et du gouverneur de l’Utah ces derniers jours. Mais le robot conversationnel n’est pas revenu sur les statistiques qu’il avait reprises.
Ces dernières heures, l’outil continue d’ailleurs de mentionner le chiffre de 76% des meurtres extrémistes liés à l’extrême droite diffusé par l’ADL, entre autres sources, lorsque les internautes l’interpellent (nouvelle fenêtre). Comble de l’ironie, il indique même dans un message publié ce mercredi (nouvelle fenêtre) que « le ministère de la Justice a supprimé son étude soulignant cette tendance autour du 12 septembre 2025, selon des rapports récents »
.
Reste toutefois que dans certaines réponses, il glisse désormais quelques éléments destinés à temporiser le propos, laissant supposer une modification dans sa configuration. « Des incidents se produisent des deux côtés, notamment lors de cas récents comme l’assassinat de Charlie Kirk, lié à des motivations de gauche »
, souligne-t-il par exemple dans un message (nouvelle fenêtre). Mais le ton varie d’une publication à l’autre. « Les événements récents comme le meurtre de Charlie Kirk font l’objet d’une enquête, mais ne modifient pas la tendance générale »
, glisse-t-il dans une autre (nouvelle fenêtre).
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