- Des publications virales sur les réseaux sociaux prétendent que s’exposer au soleil sans protection ne provoque pas de cancers dangereux.
- Éviter le soleil serait, selon elles, encore plus cancérigène.
- Ces affirmations, soumises à plusieurs spécialistes, sont évidemment complètement fausses.
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L’info passée au crible des Vérificateurs
Bronzer ou ne pas bronzer… telle est la question ? Alors que les vacances approchent, certains internautes remettent en question les dangers de l’exposition au soleil. Une publication partagée (nouvelle fenêtre) sur X le 6 juillet prétend ainsi que l’exposition au soleil ne provoquerait que « des cancers sans danger »
, alors que l’évitement du soleil provoque les « cancers les plus mortels »
. Une « étude suédoise »
aurait révélé « qu’éviter la lumière du soleil augmentait de 60% le risque de décès prématuré ».
La promotion de la crème solaire ne serait pas justifiée et il faudrait en ce sens une « rééducation sur le soleil »
. Toutes ces affirmations sont trompeuses et fausses, selon les experts interrogés par les Vérificateurs de TF1/LCI.
La publication en question (nouvelle fenêtre) est la traduction française d’un post en anglais, qui cite comme source un article de blog, signé « le docteur du Midwest »
. L’auteur est anonyme, il ne s’agit pas d’un article rigoureux issu d’une vraie revue scientifique ou d’une source crédible, mais de la newsletter du site complotiste gorgé de fausses informations « The Forgotten Side of Medicine (nouvelle fenêtre) » (« La face cachée de la médecine », en anglais, ndlr
).
Il existe bien une étude suédoise (nouvelle fenêtre) publiée en 2016 dans le Journal of Internal Medicine sur les risques de santé liés à un manque d’exposition au soleil, mais ce qui est affirmé dans la publication est une interprétation trompeuse de ce qu’elle démontre. Un échantillon de 29.518 femmes suédoises a été étudié pendant 20 ans. L’étude conclut que les femmes qui s’exposent au soleil
voient diminuer les risques de mortalité liés aux maladies cardiovasculaires. Elle ne prouve pas que l’évitement du soleil provoque des cancers plus mortels que l’exposition au soleil.
Le soleil présente effectivement des bénéfices pour la santé, notamment parce qu’il est une source naturelle de vitamine D. Cette substance joue un rôle essentiel dans l’absorption du calcium et le renforcement de notre système immunitaire. Mais il suffit d’une « quinzaine de minutes d’exposition par jour, du visage et des avant-bras, deux à trois fois par semaine »
pour assurer un apport suffisant en vitamine D à notre organisme, selon le Dr Élodie Archier, dermatologue à l’Hôpital Saint-Joseph à Marseille. Il est par ailleurs scientifiquement établi que l’exposition au soleil est « la cause principale des cancers de la peau »,
selon Santé publique France (nouvelle fenêtre), l’Institut national du cancer (nouvelle fenêtre), la Ligue contre le cancer (nouvelle fenêtre), mais aussi l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (nouvelle fenêtre). Les expertes que nous avons interrogées nous rappellent les risques et les meilleurs moyens de se protéger, sans pour autant encourager à complètement fuir le soleil.
Le soleil cause bien des « cancers qui tuent »
La publication affirme que le soleil ne provoque pas de cancers « dangereux »
, ce qui est faux. « L’exposition au soleil peut causer des cancers de la peau qui sont mortels. Le mélanome, encore aujourd’hui en 2025, est l’un des cancers qui tuent, même si on a eu des évolutions révolutionnaires dans les traitements »
, nous rappelle le Dr Elodie Archier, dermatologue à l’Hôpital Saint Joseph à Marseille (nouvelle fenêtre). Les deux principaux types de cancers de la peau sont les carcinomes et les mélanomes, les plus graves, car ils ont un potentiel métastasique.
Ensuite, l’exposition au soleil et « aux rayons ultraviolets (UV) de manière absolue »
est le principal facteur carcinogène de la peau, « impliqué dans 70 à 80% des cas des cancers cutanés »
, nous confirme le Dr Rima Fathallah, dermatologue à l’hôpital Paris Saint Joseph. « Ces rayonnements UV sont à l’origine des altérations de notre ADN, du dysfonctionnement du système immunitaire et donc de l’initiation, de la promotion et du déclenchement des cancers »,
affirme la spécialiste. Les rayons UV, en dose excessive, agressent les cellules de la peau et abîment les gènes des cellules exposées.
Et nous ne sommes pas tous égaux face aux risques. « Les patients qui ont un phototype clair, comme une peau très blanche, roux, aux yeux clairs, une certaine génétique, une certaine hérédité de mélanome, ont plus de risques de développer un cancer, »
nous explique le Dr Fatallah. L’exposition solaire et les éventuels coups de soleil dans l’enfance et plus tard jouent aussi un rôle significatif dans l’augmentation des risques.
Il y a des cancers de la peau y compris chez les peaux mates
Il y a des cancers de la peau y compris chez les peaux mates
Dr Archier, dermatologue à l’Hôpital Saint Joseph à Marseille
Le bronzage est une pigmentation de la peau, due à la synthétisation de la mélanine, en réaction à l’exposition aux UV. « C’est valorisé dans certaines sociétés, mais en réalité, c’est déjà une réaction de défense de l’organisme face à une agression »
, ajoute le Dr Archier. Cela ne signifie pas pour autant que les personnes à la peau mate ou noire ne doivent pas faire attention. « Il y a des cancers de la peau y compris chez les peaux mates. Bob Marley est décédé d’un mélanome métastatique par exemple, »
souligne le Dr Archier. « Le soleil peut aussi causer des tâches et accélérer le vieillissement cutané, »
explique la spécialiste.
Entre 1990 et 2023, le nombre de nouveaux cas de cancers de la peau a été multiplié par trois (nouvelle fenêtre) en France. Les dermatologues que nous avons interrogées l’expliquent par « plus de dépistages et de diagnostics »
, la valorisation du bronzage dans les standards de beauté et « des expositions au soleil plus intenses »
.
Profiter sans se mettre en danger
Faut-il pour autant complètement fuir le soleil ? Non, il suffit d’« avoir de bonnes habitudes
« , selon le Dr Archier. « Nos grands-parents ne s’exposaient pas entre midi et deux ! Autrefois, il était normal de s’exposer au soleil aux heures de faible ensoleillement, c’est-à-dire le matin ou bien le soir après 16/17 heures et de rester à l’ombre pendant ces heures-là »
, nous rappelle la dermatologue.
Les plus à risque sont les tout-petits. Les enfants de moins de 3 ans ne doivent pas du tout être exposés au soleil. Au-delà de cet âge, ils doivent être habillés, équipés de chapeau et enduits de crème solaire indice 50. Ceux qui travaillent en extérieur doivent aussi redoubler de précautions. « Les agriculteurs, qui vont avoir une exposition solaire intense et quotidienne, ont plus de risques de développer des cancers de la peau. C’est pourquoi ils ont pris l’habitude depuis longtemps de travailler avec des casquettes, des vêtements plus couvrants »
, nous éclaire la spécialiste.
La protection vestimentaire, l’ombre des immeubles et des végétaux et la crème solaire sont efficaces. « Un indice 50 va protéger à 98% de la pénétration des rayonnements ultraviolets qui sont problématiques »
, nous explique le Dr Archier. Un indice 30 « protège déjà très bien aussi »
et « peut suffire »
pour les phototypes les moins clairs, selon la dermatologue. Mais les médecins rappellent qu’il faut bien penser à réappliquer de la crème au moins toutes les deux heures pour que ce soit efficace.
Le Dr Fatallah rappelle pour sa part qu’un temps nuageux ne signifie pas qu’il n’y a aucun risque. « On a ce qu’on appelle la réverbération, le sol peut réfléchir les UV, et les nuages ne filtrent que très partiellement, donc il faut garder ses bonnes habitudes. La protection solaire ce n’est pas seulement à la plage, en maillot, c’est tous les jours »
, conclut la médecin.
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