- Une vidéo devenue virale prétend qu’un propriétaire marseillais a porté plainte contre les pompiers de la ville.
- Ces derniers auraient utilisé sa piscine pour éteindre un incendie au début du mois.
- Il s’agit d’une fausse information générée par l’intelligence artificielle.
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L’info passée au crible des Vérificateurs
Entre insultes et sidération, c’est peu dire que la rumeur fait vivement réagir. D’après une vidéo apparue ce dimanche 27 juillet sur TikTok, le propriétaire d’une maison cossue avec piscine située sur les hauteurs de Marseille aurait porté plainte contre les pompiers. En cause : l’utilisation par les soldats du feu de l’eau de la piscine, dans laquelle ils se seraient servis pour éteindre un incendie. « Il réclame un dédommagement pour ‘préjudice moral et matériel’
, poursuit la publication (nouvelle fenêtre), assurant qu’une « procédure est en cours ».
Un clip de quelques secondes vu près de cinq millions de fois en deux jours… mais qui interroge.
Fautes d’orthographe et vidéos détournées
À commencer par le commentaire qui accompagne les images. Si le style se veut journalistique, expliquant que les pompiers auraient agi faute de « point d’eau naturel à proximité »
, le texte multiplie les fautes d’orthographe. La garrigue, cette végétation caractéristique des régions méditerranéennes, est transformée en « garig », la villa est située en « surplons » de la ville (et non en surplomb) et le propriétaire n’aurait pas payé l’eau à ses frais mais « assez frais »
. Autant d’erreurs grossières qui devraient faire sursauter n’importe quel créateur de contenu sérieux. La source de cette rumeur est d’autant plus suspicieuse qu’elle n’a jamais publié d’autre contenu sur son compte TikTok (nouvelle fenêtre).
Reste que l’internaute utilise deux vidéos sur lesquelles on distingue clairement un hélicoptère bombardier en train de remplir son seau dans une piscine privée. Sauf que les images n’ont rien à voir avec les récents incendies qui ont frappé Marseille. Ainsi, le clip visible au début de l’extrait a été capturé en Australie en novembre 2019, lors de l’une des saisons les plus dévastatrices et extrêmes qu’a connue le pays. L’hélicoptère, visible dans la vidéo ci-dessous, collectait de l’eau pour éteindre l’incendie de Green Wattle Creek, au sud-ouest de Sydney, comme l’expliquait le média australien ABC Emergency (nouvelle fenêtre).
Le second extrait ne montre pas non plus des événements dans le sud de la France. Grâce à une recherche d’image inversée, on découvre qu’il s’agit d’une mesure de derniers recours prise par les pompiers en aout 2021 (nouvelle fenêtre), lorsqu’ils se battaient contre un incendie à Olloki, en Navarre, au nord de l’Espagne.
On ne trouve par ailleurs aucune information à ce sujet dans la presse locale. Interrogé par TF1info, le parquet de Marseille affirme n’avoir « pas connaissance »
d’une plainte allant dans ce sens. Autant d’indices qui laissent penser que cette vidéo est totalement fausse. Et qu’elle s’inscrit dans un phénomène de plus en plus répandu (nouvelle fenêtre). L’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) pour créer des contenus qui copient les codes des médias afin d’alimenter le buzz ou désinformer.
Utiliser une piscine en cas d’incendie ? C’est possible
Alors cette scène aurait-elle été possible en France ? Pour le savoir, il faut se pencher sur le règlement national (nouvelle fenêtre)de défense extérieure contre l’incendie. Or ce texte, qui sert de référence depuis 2015, considère « que les piscines privées ne présentent pas les caractéristiques requises »
pour être considérées comme des points d’eau incendie (PEI). Plusieurs garanties essentielles ne sont pas réunies dans ces lieux privés, dont les risques sur « l’accessibilité aux engins d’incendie »
et la « pérennité de la ressource »
. Si le propriétaire a vidé sa piscine, si elle n’existe plus ou si elle est recouverte ce jour-là, l’hélicoptère aura fait le trajet pour rien.
Toutefois, rien n’interdit qu’une piscine soit effectivement utilisée de manière ponctuelle par les soldats du feu. Dans le premier cas, cela peut se faire « à l’initiative de son propriétaire »
. Ce dernier peut mettre son point d’eau à disposition des secours, « sous réserve d’en assurer l’accessibilité et la signalisation »
via une convention signée avec la mairie. Dans le second cas, « une piscine privée peut être aussi utilisée en dernier recours dans le cadre de l’état de nécessité »
, poursuit le règlement.
Mais cela ne peut être réalisé qu’en cas d’extrême urgence, avec l’autorisation de la police. Interrogé pour savoir si cette procédure avait été enclenchée lors des incendies à Marseille, les pompiers ne sont pas revenus vers nous dans l’immédiat.
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