- Le Conseil constitutionnel a décidé ce jeudi de censurer la réintroduction très controversée d’un néonicotinoïde jusqu’alors interdit en France.
- Plusieurs élus de gauche, opposés au texte, ont salué cette décision, tandis que la droite, à l’inverse, a regretté un choix qui fragilisera l’agriculture française selon elle.
- La censure du retour du pesticide divise aussi les syndicats agricoles.
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Agriculture : une pétition contre la très contestée loi Duplomb bat tous les records
La décision était scrutée de près, dans un climat électrique, et a logiquement déclenché de vives réactions. Le Conseil constitutionnel a décidé ce jeudi 7 août de censurer la disposition la plus contestée de la loi Duplomb (nouvelle fenêtre), qui prévoyait la réintroduction sous conditions d’un pesticide interdit de la famille des néonicotinoïdes. La classe politique se divise sur le choix des Sages, entre gauche soulagée et droite en colère.
Sous pression à la fois de l’opinion (nouvelle fenêtre), mais aussi du monde agricole, le Conseil constitutionnel a finalement estimé que « faute d’encadrement suffisant »
,
la réintroduction de l’acétamipride était contraire à la Charte de l’environnement. Emmanuel Macron en « a pris bonne note »
, et « promulguera la loi telle qu’elle résulte de cette décision dans les meilleurs délais »
, a réagi l’Élysée.
La gauche célèbre, mais veut toujours une abrogation
La décision du Conseil a rapidement été accueillie avec soulagement par la gauche, qui avait déposé un recours devant le Conseil constitutionnel (nouvelle fenêtre). « Le cœur de la Loi Duplomb soutenue par la Macronie, la droite et l’extrême droite est censurée »
, s’est félicité la cheffe des députés insoumis Mathilde Panot. Le coordinateur du parti Manuel Bompard a lui salué une « première victoire »
, mais ajouté que « la mobilisation doit se poursuivre jusqu’au retrait de la loi et à la censure »
du gouvernement.
« VICTOIRE pour la santé humaine et environnementale ! »
, s’est réjoui également le Parti socialiste sur X. « Un soulagement »
, a abondé son numéro 1 Olivier Faure sur le même réseau. « Il faudra tout de même retenir et prendre la mesure des actes de ce gouvernement »
, qui a soutenu un texte qui « sacrifiait à la fois la santé
des agriculteurs, des consommateurs et la biodiversité
(nouvelle fenêtre)«
, a-t-il accusé. « Quelque chose s’est levé qui ne doit pas faiblir »
, a-t-il ajouté.
La décision « confirme en cela que le mal-nommé
bloc central n’a rien compris aux questions environnementales, malgré les alertes
des scientifiques et des médecins
(nouvelle fenêtre)«
, a écrit de son côté la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier. Mais « la censure d’un article ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt »
, a-t-elle ajouté, appelant à « abroger »
la loi.
La droite accuse les Sages « d’ingérence »
À l’inverse, ses défenseurs ont naturellement contesté cette décision. Le sénateur LR Laurent Duplomb, qui donne son nom à la loi, s’est dit « déçu »
de la censure de la réintroduction du néonicotinoïde, sur LCI. « Je pense que c’était une vraie capacité pour la production française de se maintenir dans la
possibilité de continuer de produire
(nouvelle fenêtre)«
, a-t-il déploré, dans la vidéo ci-dessous. « Je continuerai ce combat, à travers les différentes possibilités que j’ai, (…) parce que je pense qu’à un moment donné, il y aura un réveil des consciences »
, a-t-il encore insisté.
Loi Duplomb : le Conseil consitutionnel censure la réintroduction contestée d’un pesticideSource : TF1 Info
Le président du groupe LR à l’Assemblée Laurent Wauquiez a lui accusé le Conseil constitutionnel de « décide(r) à la place des élus d’interdire ce qui était autorisé il y a cinq ans »
, estimant que « le niveau d’ingérence des juges constitutionnels devient un vrai problème pour notre démocratie »
. Du côté du RN, son porte-parole Laurent Jacobelli a fustigé un choix « scandaleux »
, qui « porte un coup de grâce à nos agriculteurs et piétine la volonté populaire »
. « En se comportant comme un législateur alors qu’il n’en détient pas la légitimité démocratique, le Conseil constitutionnel scie la branche sur laquelle il est assis »
, a estimé Marine Le Pen.
Un choix « inacceptable » pour la FNSEA
Quant aux syndicats agricoles, la première organisation du secteur, la FNSEA, a vivement critiqué la décision des Sages. Ce choix « marque l’abandon pur et simple de
certaines filières de l’agriculture française
(nouvelle fenêtre), alors même que notre dépendance aux importations s’accentue »
, a tancé sur X son président Arnaud Rousseau. C’est « un choc, inacceptable et incompréhensible »
, a martelé auprès de l’AFP Jérôme Despey, le vice-président, estimant que « le Conseil constitutionnel continue à permettre des surtranspositions »
du droit européen qui autorise l’acétamipride jusqu’en 2033 dans l’UE. La Coordination rurale, deuxième syndicat agricole, a estimé de son côté que « l’agriculture n’est rien pour eux, par rapport à l’environnement ».
À l’inverse, la Confédération paysanne, troisième syndicat agricole qui défend une « réelle »
transition agroécologique, a salué une « victoire d’étape »
, appelant à « continuer de mettre la pression pour obtenir une réorientation des politiques agricoles »
.
Des associations et plusieurs médecins ont de leur côté salué cette décision. « Nous sommes très attachés à ce qu’en termes d’exposition à des produits potentiellement dangereux, il faille respecter conformément à la Constitution le principe de précaution »
, a réagi auprès de l’AFP le vice-président de l’Ordre des médecins, Jean-Marcel Mourgues. Mais « on ne peut que se satisfaire »
de ce choix, a-t-il ajouté, soulignant « la réalité des problèmes des agriculteurs »
. « Cette décision élève les enjeux au-delà du seul acétamipride »
, le texte donnant « un blanc-seing à de futures dérogations pour d’autres néonicotinoïdes »
, a réagi de son côté la Ligue contre le cancer.