Face au succès, Victor Wembanyama a choisi de rester humble, d’où une exposition savamment dosée dans les médias.
Le géant du basket français a fait une exception en accordant une interview exclusive à Audrey Crespo-Mara au centre d’entrainement des Spurs de San Antonio, au Texas.
Dans ce « Portrait de la semaine », diffusé ce dimanche 16 juin sur TF1, il se livre sur son parcours hors normes avec une sérénité et une maturité hors du commun.
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« Alien », « extraterrestre », les qualificatifs ne manquent pas pour désigner Victor Wembanyama. À 20 ans, ce prodige français du basket suscite des attentes immenses, un an après avoir été choisi en première position de la draft de la NBA par les San Antonio Spurs. Devenu en quelques mois un phénomène du championnat américain, il cumule des titres inédits pour un Français, et même pour tout débutant dans le championnat le plus relevé du monde. Face au tourbillon sportif et médiatique qui le précède désormais, que se passe-t-il dans cette tête qui culmine à 2,24 m ? « Extraterrestre, c’est un surnom que j’aime bien parce que ça évoque quelque chose de différent de ce qu’on connait, d’un autre monde. Et c’est un peu l’objectif de créer quelque chose de nouveau. L’originalité, c’est aussi quelque chose que je cherche constamment dans ma vie », explique-t-il face à Audrey Crespo-Mara, dans l’entretien que l’on peut retrouver ci-dessus.
C’est un combat tous les soirs. Il y a clairement en face cinq personnes sur le terrain qui me veulent du mal.
C’est un combat tous les soirs. Il y a clairement en face cinq personnes sur le terrain qui me veulent du mal.
Victor Wembanyama
Avec sa taille de géant, Victor Wembanyama atteint une envergure de 2,45 m, qui gène considérablement ses adversaires. Mais ses caractéristiques morphologiques hors-norme lui imposent autant d’adaptations. « Parfois, on a l’impression de bouger avec un sac de pierres sur le dos. C’est passer outre ces difficultés qui est le challenge de tous les jours. Par exemple, quand on court pendant 40 minutes, tous les signes de notre corps disent : ‘arrête, repose-toi, assieds-toi' », dit-il. Mais attention à ne pas réduire Victor Wembanyama à sa seule morphologie. « Il y a des variétés malheureusement dans les réactions répétitives des gens. Cela va d’un simple regard ou une expression de choc un peu ostentatoire, à des remarques ou des blagues déplacées », admet-il.
Car le joueur a d’autres qualités et notamment une clairvoyance du jeu hors du commun, une « vista », comme disent ses coachs. « C’est beaucoup de feeling déjà. Je dirais que ça vient aussi par une capacité à garder la tête hors de l’eau, à rester lucide avec la pression des défenseurs, de la salle dans laquelle on joue, de l’enjeu », explique-t-il. Et d’ajouter : « Ça se rapproche vraiment des échecs. En fait, ça va être une bataille de savoir qui du défenseur ou de l’attaquant va avoir le plus de coups d’avance et le plus de manières de répondre aux coups de son adversaire ».
Pour autant, la partie ne se gagne pas facilement. Et tel un héros de manga, un genre qu’il affectionne particulièrement dans ses lectures, le Français va devoir s’affirmer dans ce championnat américain très exigeant. « C’est un combat tous les soirs. Il y a clairement en face cinq personnes sur le terrain qui me veulent du mal. Mentalement, c’est dur parce que c’est très exigeant au niveau de l’engagement. Et pour moi, la plus grande difficulté cette saison, c’était de répondre présent à chaque match, vraiment », assure-t-il, précisant que pendant la saison, « ce sont des déplacements fréquents avec quatre heures de décalage horaire entre la côte ouest et la côte est », contre « un match ou deux, maximum, par semaine en France ».
Un « phénomène mondial »
Reste que Victor Wembanyama était fait pour cette carrière de champion, avec une première distinction au terme de sa saison convaincante chez les Spurs puisqu’il a été désigné « rookie de l’année » (meilleure jeune recrue). Une récompense convoitée en NBA. « Ce titre revient au jeune qui a eu le plus d’impact collectivement sur son équipe », détaille-t-il, fièrement. Il faut dire que le sport est une constante déterminante dans sa famille, avec un papa spécialiste de saut en longueur et de triple saut et une maman ex-basketteuse professionnelle, devenue coach. Aussi loin qu’il s’en souvienne, « Wemby », comme on le surnomme, a même toujours eu un ballon orange dans les mains. « En vacances, c’étaient des séances d’athlétisme, des séances de courses et beaucoup de conseils. Des choses qui ne sont pas du tout apprises dans le circuit normal et qui sont pourtant essentielles », se souvient-il.
Ses parents lui ont aussi laissé une grande liberté. « Mon projet, c’était d’être au plus haut niveau au basket et ils ont tout fait pour me permettre d’y arriver. Mais si aujourd’hui, je leur dis que je ne veux plus faire de basket et que je veux être expert-comptable, ils vont faire tout leur possible pour m’aider à être expert-comptable », clame-t-il. Une volonté de le faire grandir qui n’a pas de prix, selon lui. Tout comme la présence de sa grande sœur et de son frère, basketteurs professionnels ou en voie de l’être. « Mon environnement est totalement propice à ne pas me faire ressentir la pression », ajoute-t-il. Une bénédiction alors qu’on le présente comme un « phénomène mondial », voire « le plus grand espoir de l’histoire du basket ».
Une notoriété dont il ne veut pas s’enivrer. Loin de là. « C’est pas ce qui me nourrit, ce qui me fait vibrer. Je ne cherche pas à en jouer », lance-t-il. Difficile pourtant quand on est l’objet d’une véritable « Wembamania » à San Antonio, où son portrait fleurit un peu partout sur les murs. « Cette ferveur, je la ressens, mais c’est uniquement du positif. Ce n’est pas du tout agressif ou intrusif, contrairement à d’autres villes comme New-York où des chasseurs d’autographes viennent frapper dans la nuit aux portes de l’hôtel », avoue-t-il.
Victor Wembanyama est également très attendu en France où il devrait être l’une des stars des Jeux de Paris. « Cette fois-ci, c’est spécial parce que c’est avec l’équipe de France. Ces matchs rajoutent toujours une dimension supplémentaire à l’envie, à l’énergie. Je pense que c’est du patriotisme. Ça représente une grande partie de ce que je veux faire dans ma carrière, de titres à aller chercher. Je ne peux pas accepter de perdre contre un autre pays quand je représente la France », prévient-il. Et l’enjeu est de taille. Il s’agit d’aider les Bleus à décrocher une nouvelle médaille olympique, « si possible dorée », après l’argent obtenu à Tokyo en 2021. D’autant qu’à Tokyo, les Bleus avaient échoué en finale face… aux Américains.